L’an dernier, je postais dans la période pascale un article qui sembla attirer un peu l’attention mais dont on me reprocha parfois l’illustration représentant un homme nu qui aurait pu être le Ressuscité : un homme.

Mais la question de fond est : qui est l’homme qui ressuscite quand on ressucite ? Ce qui pourrait nous amener à plein d’autres questions et de longs développements. Par exemple : quel est l’homme, quelles parties de moi… Tout moi ? Probablement pas nos masques, apparences, vêtements de toute sorte qui servent à occulter qui nous sommes vraiment. Ce qui passe la mort et est re-sucité est probablement la partie la plus vivante de moi. Et je ne peux pas m’empêcher de penser que c’est alors aussi la partie la plus vraie de moi.

La plus vraie… “Qu’est-ce que la vérité ?” demande Pilate, étrangement, peu de temps avant la condamnation de Jésus (Jn 18,38). Jésus semble le savoir puisqu’à ceux qui veulent bien le suivre, il déclare : “Je suis le chemin, la vérité, la vie” (Jn 14,6). Les trois à la fois : chemin-vérité-vie. Laissons-nous quelques instants pour méditer sur cette question : dans l’esprit de Jésus, ces trois mots sont-ils synonymes, complémentaires, s’entraînant l’un à l’autre ? Question stérile à vrai dire puisqu’il y répond : “il est” le chemin , la vérité, la vie. C’est consubstantif de son être, on ne peut pas le lui enlever. Il l’est comme Dieu est, ainsi qu’il se désigne lui-même quand Moïse lui demande son nom: “Je suis” . Que puis-je te dire d’autre que cela : je suis celui qui est, je suis au delà de tout nom. Je suis la vie, je suis l’être, je suis la vérité. Je suis le souffle qui te traverse et te fait te préoccuper de justice et de liberté. Je l’étais hier et je le serai demain. Je le suis. Je suis.

Par Jésus, avec Jésus et en Jésus (par lui, avec lui, et en lui…), dans cette humanité-là, je suis. Cette humanité qui est la tienne aussi. Cette part de toi qui est divine et que j’aimerais bien retrouver et que je ne me lasserai pas de chercher et susciter et resuciter sans cesse. Oh, j’ai dit “divine” ? Je voulais dire vivante. Ne va pas te faire des illusions avec le mot “dieu” et ses caractéristiques “divines”. Si tu te souviens bien, quand tu t’es préoccupé d’avoir un accès direct à moi comme si je t’étais extérieur, Jésus t’a fait la seule réponse qui vaille : “Quoi? si longtemps que tu es avec moi et tu n’as toujours pas compris ? Qui me voit voit le Père.” (Jn 14, 9-12)

Encore l’humanité.
Encore la Vérité.

Encore ce besoin de message ou de preuve extérieurs
alors que moi, Jésus, dans mon humanité,
jusqu’à mon passage de la mort et le fait que je sois re-suscité,
je suis en train de te montrer ce qui te concerne
dans TON humanité.
Et je n’ai pas de meilleur moyen pour te le montrer
que de le vivre pour toi
dans MON humanité.

Regarde :
rien ne passe la mort
sauf ce que je suis vraiment :
le chemin, la vérité, la vie,
qui je suis vraiment.

Bas les masques,
bas les apparences,
bas les vêtements d’apparat.
Fumée, poussière, rien n’en restera.

De ton corps même,
tel que tu l’imagines,
amas de cellules à durée limitée
rien ne restera.

Mais ton être ?
Cette vie qui te traverse,
qui vient de plus loin que toi,
qui n’est pas toi
et qui pourtant est toi
quand tu communies à elle,
cette vie qui anime tes cellules,
qui te te fait aspirer à la paix, à l’amour,
à la vérité…

Ton être,
cette partie de toi
qui est de moi,
qui vient de moi
qui va à moi
– si tu le veux bien.
Mystère d’amour
que l’amour
veuille se trouver lui-même
et se remette en cause sans cesse
par amour
de l’amour.

Bien sûr,
que quand je suis re-suscité,
le don de ma vie
n’annihile pas
le déploiement de l’amour
dans l’ek-sistence
de ma vie terrestre.
Mon corps reste marqué
de ces coups reçus
par le manque d’amour
quand j’offrais
seulement
un chemin,
la vérité,
la vie.

Scandale pour les uns,
honte pour les autres,
le signe de la croix.
La vie
crucifiée,
outragée,
rejetée.
L’amour
abandonné,
banni
moqué
comme impossible.
Le chemin
refusé,
discuté,
perverti
par le discours trompeur
de ceux qui ont peur
et parlent
de ce dont ils ne connaissent rien.

Alors voilà :
même crucifié,
mort, enseveli,
je suis le chemin, la vérité, la vie.
Les marques sur mon corps,
les supplices de la croix,
ces trous dans mes mains et dans mes pieds
– tu vois, hein, de quoi je veux parler ? –
eh bien, ils sont bien là,
tu peux vérifier :
c’est bien moi.

Bas les masques,
bas les apparences,
bas les vêtements d’apparat.

Seule, la vérité compte.

Pourquoi, dès lors,
chercher le Vivant parmi les morts ?
Pourquoi vouloir le toucher, se l’accaparer
comme garantie d’être sauvé sans rien faire
alors que le chemin est clair :
choisir la vérité, choisir la vie,
laisser advenir en moi le Vivant
et refuser tout ce qui occulte qui je suis
et m’empêche de revenir à la maison
pour la fête des retrouvailles.

– Lui aussi, le fils prodigue, on le revêtira d’un vêtement,
ce ne sera pas pour recouvrir sa nudité,
mais pour restaurer sa dignité.
Vêtement blanc, resplendissant,
transparent peut-être,
vêtement de vérité.
Tu es plus beau que ce tu crois,
enfant de Dieu
qui passe ton temps à te salir tout seul
en oeuvrant contre toi-même.

Le vigneron est venu,
les ouvriers l’ont mis à mort.
Que fera le maître de la vigne ?

Cherchez le Seigneur tant qu’il se laisse trouver ;
invoquez-le tant qu’il est proche.
Que le méchant abandonne son chemin,
et l’homme perfide, ses pensées !
Qu’il revienne vers le Seigneur
qui lui montrera sa miséricorde,
vers notre Dieu
qui est riche en pardon.
(Isaïe 55)

La vérité :
je suis à la fois la vigne du Seigneur
et le vigneron.
La vie m’est donnée dans cette existence terrestre
avec un corps pour la porter et la faire fructifier.
Cette vie terrestre prendra fin,
pas l’élan vital,
la vérité de qui je suis.

Reste une question : la tradition chrétienne parle bien de résurrection des corps. Alors, que restera-t-il de moi, de mon apparence, de mes capacités physiques, etc. Il y a à ce propos un quiproquo qui tient aux mauvaises traductions de l’hébreu et du grec en latin puis en français. Le mot que l’on a traduit par corps est basar en hébreu ou sarx en grec qui désignent plutôt la chair, c’est-à dire la substance du corps vivant qui est irrigué par le sang.

C’est le mot “basar” que l’on trouve par exemple en Gn 2,24 : “l’homme quittera son père et sa mère, et s’attachera à sa femme, et ils deviendront une seule chair (basar)” pour expliquer la génération d’enfants, ou dans le Psaume 62 : “Mon âme a soir de toi, après toi languit ma chair(basar)” et non pas mon corps.

C’est le mot sarx que l’évangéliste Jean emploie quand il déclare que le Verbe s’est fait chair (Jn 1,14) ou quand il fait dire à Jésus qu’il est le pain vivant et “c’est ma chair (sarx), que je donnerai pour la vie du monde” (Jn 6,51), ainsi qu’à chaque fois qu’il dit que sa chair (et non son corps) est nourriture, ainsi également que dans son grand discours dans lequel on trouve : “selon que tu lui as donné pouvoir sur toute chair (sarx), afin qu’il accorde la vie éternelle à tous ceux que tu lui as donnés.” (Jn 17,2)
[voir un commentaire de ce dernier passage, ici]

Conclusion : ce corps que je cache parfois ou que j’utilise à d’autres fins que d’entendre l’appel intérieur s’arrêtera. Mais ma chair, la partie vivante en moi, la partie irriguée de vie en moi, perdurera. Cette partie de moi qui sait prendre forme
et animer tout mon organisme, elle vivra. Sous une forme ou sous une autre, celle-ci n’ayant plus grande importance si ce n’est pas pour une existence terrestre.

Le récit par Jean de la course au tombeau par les deux apôtres, Pierre et Jean, n’en est que plus touchant. Un récit plein d’humanité, plein de promesses aussi. Ils courent à la recherche d’une bonne nouvelle : la pierre est roulée, leur ont dit les femmes. Peut-être est-il encore vivant ? Alors ils courent, le vieux, le jeune. Le jeune arrive le premier, il attend son aîné respectueusement. Et ils voient, chacun à leur manière : Jean voit les linges posés à plat. Pierre voit aussi les lignes posés à plat, mais aussi, le linge qui entourait la tête de Jésus, roulé à la même place, à part des autres linges. Pour être clair : pas du tout comme si quelqu’un avait fait le ménage et plié et rassemblé les draps. Les linges sont simplement là sans le corps de Jésus : à plat sur l’étendue de son corps, en boule – la boule qui entourait sa tête) à l’emplacement de la tête.

Alors, ils comprennent. Il est bien vivant. Mais pas comme ils l’avaient imaginé.
Alors ils se souviennent. Il est vivant comme il le leur avait dit : tel qu’on est vivant après le passage de la mort et qu’on est re-suscité.

Ils couraient tous les deux ensemble,
mais l’autre disciple courut plus vite que Pierre
et arriva le premier au tombeau.
En se penchant, il s’aperçoit que les linges sont posés à plat ;
cependant il n’entre pas.
Simon-Pierre, qui le suivait, arrive à son tour.
Il entre dans le tombeau ;
il aperçoit les linges, posés à plat,
ainsi que le suaire qui avait entouré la tête de Jésus,
non pas posé avec les linges,
mais roulé à part à sa place.
C’est alors qu’entra l’autre disciple,
lui qui était arrivé le premier au tombeau.
Il vit, et il crut.
Jusque-là, en effet, les disciples n’avaient pas compris
que, selon l’Écriture,
il fallait que Jésus ressuscite d’entre les morts.

(Jean, 20,3-9)

En ce temps-là, Jésus leva les yeux au ciel et dit : « Père, l’heure est venue.Glorifie ton Fils afin que le Fils te glorifie. Ainsi, comme tu lui as donné pouvoir sur tout être de chair, il donnera la vie éternelle à tous ceux que tu lui as donnés. Or, la vie éternelle, c’est qu’ils te connaissent, toi le seul vrai Dieu, et celui que tu as envoyé, Jésus-Christ.»
(Jean 17, 1-3)

L’heure est venue…

Voilà deux semaines de suite que la liturgie dominicale nous offre des textes bien compliqués pour qui n’est pas introduit à saint Jean et, au delà, à la tradition hébraïque. Saint Jean est truffé de références à l’ancien Testament d’une manière très subtile, comme si ses interlocuteurs avaient déjà intégré spirituellement le message biblique. Il y a toujours un triple niveau de langage chez saint Jean: l’histoire qu’il raconte, le contenu spirituel auquel il renvoie, promesse de Dieu en train de s’accomplir, et ultimement le renvoi à son actualisation dans l’aujourd’hui et le maintenant du lecteur.

Alors, « l’heure est venue »… Dans le récit johannique, c’est d’abord l’annonce de la Passion. Mais c’est aussi le renvoi au contenu spirituel que porte la tradition biblique. Dans la Bible, le temps appartient à Dieu. Bien avant que les philosophes contemporains ne comprennent que le temps va de pair à la création, les chercheurs de Dieu ont compris que le temps concourrait au plan de Dieu dans l’ordre de la création. Ils l’ont compris avec leur humanité, ce qui fait qu’indistinctement ils découvrent que Dieu accorde un temps de grâces et de bienfaits, ou bien un temps de famine et de désolation.En fait, Dieu s’accomplit à travers les temps de la création.

Comme l’écrit très bien Véronique Margron, suite à la Promesse que Dieu non seulement ne nous abandonnait pas mais allait faire route avec nous jusqu’à faire sa demeure parmi nous, “Il y a eu la longue attente du peuple du Premier Testament, l’attente de la Rencontre durant l’Exode, puis le Temple de Jérusalem. Mais tous espéraient l’Alliance Nouvelle où Dieu demeurerait dans l’âme des siens, intimement présent.”

L’heure est venue de cette rencontre ultime par laquelle désormais tout homme aura accès à Dieu puisqu’il saura en l’exemple de Jésus-Christ que Dieu est le Déjà-Là de son existence qui l’attend patiemment, qui attend que l’homme vienne à lui.

Toi, qui que tu sois, y compris si tu t’interroges à cause de ce que tu découvres de toi en ton orientation sexuelle, sache-le bien : l’heure est venue pour toi aussi. Il n’y a de restriction pour personne à ce temps qui surgit du fond de toi.

Le pouvoir sur tout être de chair

J’aime bien cette nouvelle traduction “sur tout être de chair”. Auparavant on disait: “afin que ton fils te glorifie et que, selon le pouvoir sur toute chair que tu lui as donné, il donne la vie éternelle, etc.”

La formule “le pouvoir sur toute chair” rendait mieux compte de la traduction grecque mais butait sur les connotations actuelles du mot chair. Chair, on le confond rapidement avec corps, et si l’on parle de résurrection, avec la résurrection des corps, comme si les morts allaient sortir de leur tombeaux. Or la foi catholique affirme la Résurrection de la chair, pas celle des corps. Vision mécaniste de la résurrection qui n’honore pas bien la dimension spirituelle toujours présente dans l’hébraïsme. Le mot hébreu “basar” qui désigne la chair est bien plus riche que la seule désignation du corps physique, il désigne l’être profond, la substance, l’essence-même de l’être dans toute sa consistance, y compris les énergies subtiles, et ce principe d’éternité auquel Jésus fait allusion dans le même texte d’Evangile que celui cité en exergue. On comprend mieux alors le mot résurrection : ressuscité, c’est être re-suscité.

Le mot hébreu “basar” a d’ailleurs un autre sens que “chair”, il signifie aussi annonce, bonne nouvelle, nouvelle joyeuse. A peu près l’équivalent du mot “Evangile”, en grec. Et cette nouvelle, cette annonce, qui est aussi chair, elle est finalement le “principe” de l’existence, ce qui est premier et avant toute chose dans le Vivant. Au commencement était le Verbe, dit saint Jean…

L’expression “pouvoir sur toute chair” avait un autre inconvénient. Avec des siècles de théorisation sur le “péché de la chair”, on voit bien à quel style de condamnations ou, pour le moins, de moralisations cela pouvait conduire. Or, ni en grec ni en hébreu, le mot “chair” n’a de connotation sexuelle. Le pouvoir sur toute chair n’est pas un pouvoir qui consisterait à dire ce qui est permis ou non permis en matière sexuelle ou autre. C’est un pouvoir sur le vivant entier, sur le principe de vie, sur la présence divine en chacun. Présence qui désormais peut se libérer et grandir puisque nous savons que le Christ assume notre humanité de l’intérieur.

La formule “l’être de chair” a donc cet avantage d’insister sur ce qu’il y a de fondamental en chacun, avant toute forme d’incarnation : nous sommes des êtres, des êtres voulus par Dieu, voulus pour sa gloire.

Quant au mot “pouvoir”, il ne faut pas se tromper non plus, ce n’est pas le pouvoir au sens de puissance, mais au sens de capacité. Il ne s’agit pas de contraindre quelqu’un par la force mais d’une capacité à le révéler pleinement.

« Glorifie ton Fils afin que le Fils te glorifie.»

Là encore, Jean emploie un mot grec,doxa, qui renvoie à un mot hébreu, kabod. Or si kabod désigne la révérence, les honneurs, la gloire, il désigne aussi la prospérité, la richesse, la splendeur ou la dignité. Pour traduire, il faut bien trouver un mot et on a donc pris “gloire” mais en vérité cela est bien réducteur. Le mot kabod renvoie à la divinité elle même, dans le fait qu’elle est, tout simplement, sans avoir rien à justifier ni quémander.

C’est le sens profond du tétragrammme YHWH auquel Jésus fait d’ailleurs allusion plus loin, dans le même passage d’Evangile lorsqu’il dit : “J’ai manifesté ton nom aux hommes”.(Jean 17,6)

Dieu est. Et il est au principe de toutes choses. Glorifier Dieu, c’est le laisser être en nous et se déployer pour notre plus grand bonheur. Pour le lecteur non-chrétien qui viendrait sur cette page, je précise: il ne s’agit pas d’un esclavage ou d’une dépendance ; non, il s’agit bel et bien d’une libération. Car sans être “connecté” au principe de vie qui nous donne l’existence, nous passons notre temps à nous heurter à des murs, à vouloir être par nous-mêmes, à confronter notre orgueil à celui des autres, dans la souffrance, la guerre, l’opposition, le jugement.

Toi qui es homosexuel, où que tu en sois de cette découverte, sache le bien : Dieu se réalise en toi à travers ce que tu es. Il n’y a pas de condamnation concernant ce que tu découvres de toi. En acceptant qui tu es, tu révèles la Présence de Dieu en toi.

La vie éternelle

Logique avec ce qui précède : la vie éternelle, c’est qu’ils te connaissent, toi le seul vrai Dieu, et celui que tu as envoyé, Jésus-Christ.

Nous savons maintenant que le mot chair est bien plus consistant et subtil que la seule “chair” physique, nous savons qu’elle englobe ce qui maintient l’être et l’existence. Nous avons là le principe de notre origine et de notre fin ultime : nous sommes faits pour la vie éternelle.

Dans ce texte d’Evangile, Jésus rappelle qu’il fût avant le commencement du monde: “Et maintenant, glorifie-moi auprès de toi, Père, de la gloire que j’avais auprès de toi avant que le monde existe.“(Jean 17,5), ce qui rappelle le Prologue de l’Evangile de Jean : “Au commencement était le Verbe.”

Jésus revendique cette “gloire” d’être pleinement en Présence de Dieu. Pas une présence extérieure à lui, mais une présence intérieure, intime et complète. En une succesion d’affirmations distillées tout au long de ce passage d’Evangile, il dit:

« Je t’ai glorifié sur la terre en accomplissant l’œuvre que tu m’avais donnée à faire…
J’ai manifesté ton nom aux hommes que tu as pris dans le monde pour me les donner…
Je leur ai donné les paroles que tu m’avais données…
je prie pour (…) ceux que tu m’as donnés, car ils sont à toi…
je suis glorifié en eux…
Désormais, je ne suis plus dans le monde ; eux, ils sont dans le monde,
et moi, je viens vers toi. »
(Jean 17, 1b-11a)

La vie éternelle, c’est adhérer au principe de vie qui nous fonde et l’honorer de l’intérieur en le laissant s’épanouir complètement à tel point qu’on puisse ressembler à ce qu’on disait de Jésus dans la première communauté des chrétiens : “Il est passé parmi nous en faisant le bien.” Sa vie entière était tournée vers le bien et c’est ainsi qu’il honorait le Nom de Dieu qu’il portait au plus intime de lui-même.

Non seulement la vie éternelle est une Promesse mais elle est déjà là. La véritable question est : sommes-nous capables de nous conduire en enfants de cette Promesse déjà réalisée?

Toi qui es homosexuel et doutes parfois de l’amour de Dieu, entends cette promesse. Elle n’est pas conditionnée par l’acceptation des groupes humains, à leurs faiblesse, leurs limites et parfois leur bêtise.Si tu écoutes au fond de toi, tu dois bien sentir que cette Promesse ne vient pas de l’extérieur et que la voix ou la musique qui la portent, ont des accents de vérité et de profondeur incomparables avec les rumeurs de la foule ambiante. Tu es le seul à pouvoir accéder à cette vérité, à ces mots doux qui sourdent de l’intérieur et qui viennent confirmer que tu es promis à la vie éternelle. Ne t’en prive pas !

Z- 27 mai 2017

Source photo : Charlie et Alex Kotze

 

Pentecote

 

J’avais l’intention de parler de la Pentecôte, du don de l’Esprit, honorer cette belle fête chrétienne. Mais je ne le peux pas… Pas à la manière dont je l’envisageais et peut-être ne le pourrai-je jamais plus. Trop de choses se bousculent en moi en ce moment.

Je voulais parler du corps et de l’esprit, ce pauvre amas d’os et de chair, promis à la mort tandis que l’Esprit nous anime et nous conduit à la vie éternelle. Je ne peux pas.

Ce n’est pas que j’ai perdu la foi, oh non ! Ce n’est même pas que mon discours était faux. Mais face au surgissement de l’être, quel discours puis-je tenir?

Ma Pentecôte, je vais vous la raconter, puisqu’elle est en train d’advenir dans ma vie. Que puis-je faire d’autre? Elle est là qui surgit tout à coup et elle ne ressemble à rien de ce qui était prévu. Pourtant je la reconnais bien. Car elle est une force de vie gigantesque qui est en train de jaillir, me bouleverse, me réconforte, me console, me fortifie à la fois. Elle est Paix, Amour, Joie, et plein d’autres choses en même temps et tout ça confondu.

Débordement d’amour.
Jaillissement de vie.
Torrents de compassion.
Je suis submergé,
et c’est bon.

Ah ça prend une drôle de tournure : au départ c’est comme si j’étais submergé par mes propres émotions. Et me voilà à dire ou à penser que je suis bien trop sensible, que ça ne se fait pas d’écouter ses émotions à ce point là et les laisser prendre le pouvoir, mais, mais… ai-je seulement eu le temps de vraiment le penser? Elles sont déjà là, elles m’entraînent avec elles. Je suis comme porté par une vague qui m’enveloppe et me protège, et me berce, et accueille mes larmes si longtemps contenues. Ces émotions n’étaient qu’une goutte d’eau à la surface de la vague qui m’entraîne

Une digue vient de se rompre.
Un mur, des murs, des verrous, que sais-je? qui sautent.
Ca ne fait même pas mal. C’est doux, c’est bon, c’est infini.

Où est-ce ? Je ne sais pas.
Ca surgit d’un fond de moi que je ne sais pas situer physiquement,
mais ça remplit aussi l’espace et le temps,
et me relie à d’autres qui le reçoivent aussi.

C’est immense.
Immensément bon.
Ma raison me dit de faire attention,
que peut-être ça va m’entraîner n’importe où,
ou que, peut-être, ça va s’arrêter et que je me retrouverai perdu et désemparé.
– Mais tais-toi donc ma tête, je ne t’écoute plus !

Il y a ce surgissement primal qui m’emplit et qui est si bon.
Tu comprends, c’est la vie, c’est la Vie qui revient,
la folie, la joie, la fête et la danse !

Mais d’où ça vient ? Je ne sais pas. C’est partout.
Ca vient de moi mais c’est aussi le coeur de mes amis,
mes bien nouveaux amis, c’est vrai.
Ils m’ont touché le coeur, ils ont touché mon être.
Il semble que mon être
attendait un mot, un geste, de vrai amour
pour se réveiller, se libérer, grandir,
venir habiter chez lui.

Et voilà, c’est le moment.

Le plus incroyable, et c’est cela ma Pentecôte,
c’est que nous parlions le même langage,
celui de l’Être.
Tu as vu? Je ne dis même plus celui du coeur.

Ils sont gays ou pas,
ils sont de France, de Suisse, d’Italie, du Canada …
Ils sont ma famille,
Ils m’accueillent comme tels.

Et tous ces débordements
qui m’affolent un peu, je dois bien le reconnaître,
ils les regardent avec gentillesse.
C’est naturel pour eux.

C’est le plus étonnant, d’ailleurs.
Le naturel avec lequel ils reçoivent
ce que nous appelons sensibilité
et qui est en fait l’accueil tranquille
de la puissance de Vie
déposée en chacun de nous.

Mon coeur est touché,
mon être se réveille.
Je baisse les bras, je laisse les armes.
Je ne veux que ça.
Toute ma vie, j’ai attendu ça, je crois.

Où cela m’entraîne-t-il,
De quoi demain sera-t-il fait ?
Je ne sais pas.
Je ne veux pas savoir.

Pour l’instant, je veux juste continuer
à sentir le Vent gonfler mes voiles,
ouvrir toutes les portes et les fenêtres de ma maison intérieure
et rejoindre le vent des amis
qui ont déjà le coeur ouvert
et m’invitent dans leur danse
déjà commencée.

C’est la fête de la Vie.

Bienheureux amis !

Z  – 14 mai 2016

Quand arriva le jour de la Pentecôte,
au terme des cinquante jours après Pâques,
ils se trouvaient réunis tous ensemble.

Soudain un bruit survint du ciel
comme un violent coup de vent :
la maison où ils étaient assis
en fut remplie tout entière.

Alors leur apparurent des langues
qu’on aurait dites de feu,
qui se partageaient,
et il s’en posa une sur chacun d’eux.

Tous furent remplis d’Esprit Saint :
ils se mirent à parler en d’autres langues,
et chacun s’exprimait selon le don de l’Esprit.

(Actes des Apôtres, 2, 1-4)