appel-a-etre

Qu’as-tu à transmettre?

Sinon la vie,
le désir d’être,
l’encouragement à être
chez autrui.

Si son être
ne m’indiffère pas,
c’est que je suis lié.

Bien sûr,
il y a cette séparation
qui fait que l’autre
me sera à jamais
insaisissable.

Il est mystère,
merveilleux mystère.

Souvent inaccessible
à lui-même.

Mais un jour,
nous nous retrouverons.

C’est une conviction
fondamentale que j’ai
et que je ne saurai
argumenter.

Nous nous retrouverons.
Non seulement nous nous verrons
tel que nous sommes
et nous nous reconnaîtrons,

Mais il y a plus encore.

Nous nous révélerons
comme infiniment et intimement
liés.

Il ne peut pas y avoir
de division de l’Être.

Et tout cet appel à être
que je perçois en toi,

qui est ton appel à être
mais qui est le mien aussi,

en éveillant
et faisant tressaillir
mon être,

ne peut pas mourir.

L’appel à Être
est toujours signe d’éternité.

C’est pourquoi aujourd’hui
ton être m’est à la fois
familier et insaisissable.

J’ai le désir que tu sois,
que tu t’éveilles et te déploies,
et le désir de te retrouver
un jour secret de l’éternité

Où cela fait nous fera
sourire, et même rire.

Car toute retrouvaille
est joyeuse.

Et cette complicité qui nous lie
sera retrouvaille.

J’ai dit désir ?
C’est-peut-être un besoin fondamental.
Celui d’être, justement.

Qu’as-tu à transmettre ,
me demandai-je.

Rien.
Rien sinon d’être,
sans intérêt ni désir particulier,
Seulement être
pour t’inviter
à être aussi.

Z – 14/08/2015

source photo : les frères Cannata, Travis et Troy, sur fashionablymale

qui je susi

 

Qui je suis ?

Juste un petit garçon qui a peur.

 

Ca ne se voit pas bien sûr.

Et même, les gens me croient fort.

 

Et même un homme redoutable,

qui sait ce qu’il veut et où il va.

 

S’ils savaient…

 

Je ne suis qu’un petit garçon

qui a peur.

 

Bien sûr, j’ai donné le change.

Bien sûr, je me suis battu, j’ai vécu.

 

J’ai voulu être fort,

j’y ai cru, même !

 

Mais là, les remous de la vie

me ramèrent à cette peur primale.

 

Les échecs, les humiliations répétées,

la tension à être quelqu’un que je ne suis pas…

 

Tout ça me fait lâcher,

je ne contrôle plus rien.

 

Me voilà redevenu ce petit enfant

de sept ans, qui a peur.

 

Y’a rien de volontaire, rein de raisonné,

dans ce qu’il va faire ensuite.

 

Il va seulement vivre comme il peut

avec les mots redoutables qu’il vient d’entendre.

 

Il est seul , il a 7 ans, il est perdu.

il ne sait pas quoi faire.

 

Il ne saura plus jamais quoi faire.

 

Au fond, il ne sait même plus pourquoi il est là.

Alors il continuera en faisant semblant.

 

Sans jamais plus croire aucun compliment,

la vie c’est tellement traître.

 

Là, ça remonte à la surface :

 

Je suis ce petit enfant perdu,

qui aurait besoin d’être pris dans les bras,

et qu’on le console et qu’on le rassure.

 

Je suis seulement seul avec moi-même

et un grand vide tout autour.

 

J’ai sept ans, je suis malheureux

et ne sais même pas que j’ai le droit de le dire, le crier.

 

Je crois que je n’aurai plus jamais confiance.

En personne. Ni en moi, ni en les autres.

 

Tout ça, parce que ma mère, dans son inconscience,

vient de lâcher au petit bonhomme que je suis :

 

“Va-t-en, je ne t’aime plus,

je ne veux plus jamais te voir.”

 

 

Z.

des-choses-a-dire

 

Je voudrais écrire,
je ne sais pas comment faire.

Je voudrais écrire
J’ai tellement de choses à dire.

La vérité, c’est que je ne sais
Même pas lesquelles.

Mais j’ai des choses à dire.

Elles viennent de tréfonds
Que je ne connais pas
Même s’ils sont miens.

Il y a des choses à dire.
Des choses qui veulent s’exprimer.
Des choses qui veulent être.

Etre ?

Est-ce une partie de moi
Qui toque à la porte
Et dit : « ouvre-moi » ?

Peut-être.

J’ai des choses à dire.
Je suis retenu par la convenance,
Par le temps qui passe,
Par de multiples dispersions.

Et pourtant
Je ne suis qu’Un
Et j’ai des choses à dire.

Quoi ?

Zebulon

Source photo : Thomas Bunker, par Cristiano Madureira.

colere

Saleté de chômage,
Saleté de système !

Ah ce soir, je suis en colère.
Tout est parti d’une conversation futile.
Une personne disait
« Ah , ils sont de plus en plus durs en recrutement,
C’est à peine s’ils ne demandent pas le casier judiciaire de tes parents , maintenant ! »

A partir de là, le ton est monté.

D’abord sur le mot « maintenant ».
Quoi maintenant ?
Pour ceux qui ont subi cela il y a 5, 10 ou 20 ans,
Et qui n’ont pas réussi à remonter la pente,
Ce mot est insultant.
Non, ce n’est pas maintenant,
C’est depuis que la crise dure.
« Maintenant » , c’est le mot de ceux qui étaient encore dans le système
et qui, à leur corps défendant, ignoraient que ces choses-là arrivent.
Maintenant : pour chacun, un maintenant différent.
Il est des maintenant récents
Et il est des maintenant qui durent.
Bienvenue au club !

Et puis, y’en a marre à la fin de ce système,
Et pas seulement de ce système :
Y’en a marre de nos illusions,
De nos attentes
que quelqu’un nous donne un travail,
un revenu,
de la dignité.
Et si je n’ai pas le travail de mes rêves,
Si je n’ai pas le travail de mes diplômes,
Si je n’ai pas le travail de mon expérience,
Si je n’ai pas le travail de ma vie,
Suis-je coupable ?
Suis-je moins respectable ?
Foutaise !

Il y a des ignorants, des aveugles,
Encore complices de ce système qui se déliquifie,
Et qui exercent encore leur petit pouvoir
Au service de ce système.

Aveugles, dis-je, car ils ne savent pas,
Ils ne se rendent pas compte.
Parce que ce système est encore bon pour eux,
Ils estiment qu’il est bon pour tous.
Et même si c’est dérangeant tant de gens sur le carreau,
C’est que, quelque part, ils ont dû le mériter,
N’est-ce pas ?
« Voyez, moi, je suis fidèle, efficace, loyal, adaptable, polyvalente, et tout et tout,
Et rien ne m’arrive, vous voyez ?
Vous voyez pas ? »

Non, je ne vois pas,
On ne voit pas,
Nous ne voyons pas.

Ce système a vécu.

L’ère du salariat de masse a vécu.
L’ère de l’équilibre de l’offre et de la demande a vécu.
L’ère du travail pour tous a vécu.

Que reste-t-il ?
Des hommes,
Des êtres humains,
Qui veulent vivre
Et être respectés.

Bien. Puisque c’est fini,
Passons à l’étape d’après.
Accélérons-la.
C’est terminé le salariat
C’est terminé la fidélité aux entreprises,
C’est terminé la loyauté à des pouvoirs anonymes
Qui permettent l’exaltation des ego.
Oui, terminé.

Passons à autre chose.

( Je l’ai dit : je suis en colère !)

baignade dans la rivière

Ils sont cinq ou six jeunes hommes.
Tous beaux.
Ils s’amusent dans l’eau
Et par cette chaleur d’été, on les comprend.

Je les regarde.
Oui ils sont beaux.
Ils s’entendent bien, visiblement.
Probablement tous originaires du même village.
Ils se connaissent depuis l’enfance,
Ils ont appris à vivre ensemble
Ils sont différents mais savent se respecter.

Je les observe du haut de ma cinquantaine,
Et les envie d’une certaine manière.
En tout cas, je me souviens.
Combien j’étais seul, sans amis,
Non pas que je n’en veuille pas,
Mais la vie en avait décidé autrement.
J’aurais aimé avoir leur insouciance,
Connaître cette expérience de vivre au jour le jour,
D’être ensemble tout naturellement, si naturellement,
Et de vivre l’instant présent sans penser, sans soucis.

Ils ne savent pas leur bonheur
De pouvoir partager ainsi leur être avec simplicité
Et qui plus est dans un cadre naturel magnifique.
Ils n’ont pas conscience, peut-être, que cela peut manquer.

Pour ma part, j’y suis soudain attentif
Et me dis que ce qui m’a manqué est peut-être ma plus grande force.
Je ne l’ai pas eu, sinon par miettes éphémères et fugitives,
Alors je sais à quel point cela est précieux.
Il me semble que chaque fois que j’en ai eu l’occasion,
Je l’ai encouragé dans la vie des autres.

Ils sont cinq ou six jeunes hommes
Tous beaux,
Ils s’amusent dans l’eau.

J’aimerais être l’un d’entre eux
A la vérité, je suis à la fois
L’un d’entre eux
Et le lien entre eux
Qui les relie à l’univers.

Je suis le seul à le savoir.

Zabulon