« Les scribes et les pharisiens enseignent dans la chaire de Moïse. Donc, tout ce qu’ils peuvent vous dire, faites-le et observez-le. Mais n’agissez pas d’après leurs actes, car ils disent et ne font pas. Ils attachent de pesants fardeaux, difficiles à porter, et ils en chargent les épaules des gens ; mais eux-mêmes ne veulent pas les remuer du doigt.
Toutes leurs actions, ils les font pour être remarqués des gens : ils élargissent leurs phylactères et rallongent leurs franges ; ils aiment les places d’honneur dans les dîners, les sièges d’honneur dans les synagogues et les salutations sur les places publiques ; ils aiment recevoir des gens le titre de Rabbi. Pour vous, ne vous faites pas donner le titre de Rabbi, car vous n’avez qu’un seul maître pour vous enseigner, et vous êtes tous frères. »
(Mt 23,2-8)

 

Ils élargissent leurs phylactères et rallongent leurs franges. Encore une affaire de vêtement ! pourrais-je paraphraser en reprenant le titre d’un post déjà publié. C’est qu’il s’agit encore des vêtements des scribes et des pharisiens, dont on a bien compris, à travers les écrits évangéliques, que Jésus se moque de l’apparence.

Mais, premier point, il ne se moque que de l’apparence, pas du contenu.Ils enseignent dans la chaire de Moïse. Donc, tout ce qu’ils peuvent vous dire, faites-le et observez-le.” Mais ils disent et ne font pas, ils édictent des règles qui ne sont que des fardeaux – sans fondements ? – qu’ils font porter aux autres. ils se drapent des habits de la Loi et s’en vantent, ils sont fiers, ils pavanent sur les places publiques, cherchant la reconnaissance et les honneurs.

Mais les honneurs de quoi ? Ils ne sont que les serviteurs de la Loi, ses médiateurs, ses interprètes pour que chacun reçoive à chaque génération et chaque jour et en chaque culture, la Promesse de Libération dévoilée dans la geste de Moïse libérant le peuple de la servitude et servant l’Alliance sainte avec le Dieu intime, Celui-là qui sait parler au coeur de l’homme, lui murmurer son nom, lui donner la force, le courage, l’estime de lui pour accomplir sa mission. Je ne dévie pas du sujet, notre imaginaire est trop marqué par les épisodes difficiles du désert et les colères fantastiques de Moïse, si bien interprétées par Charlton Heston ou Burt Lancaster. Mais avant cela, autre que cela, il y a toute l’histoire de la rencontre de Dieu avec Moïse.

Rappelons-nous que Moïse, c’est d’abord cet hébreu élevé à la cour de Pharaon, touché par la misère des siens, capable de s’indigner face à l’injustice jusqu’à commettre un meurtre, et s’enfuir, honteux et pitoyable pour sauver sa vie. Dieu était déjà dans son coeur et il ne le savait pas encore. Dieu était au coeur de sa colère, de son combat et de sa générosité, mêmes fougueux et dispropotionnés. Il est également dans sa repentance et son désert personnel, sa vie simple et tranquille avec des valeurs autres que le prestige et les honneurs de la cour. Et évidemment Dieu est aussi au coeur de cette rencontre sur le mont Sinaï, rencontre toute de douceur et d’intimité, dans laquelle Dieu se donne tout entier par son Nom et son Être. Révélation. Dieu se donne, Dieu, est l’inspirateur de mon sentiment de justice, Dieu libère…

Du coup, si Jésus se moque de l’apparence des scribes et pharisiens, comprenons qu’il demande à ce que soit respecté le contenu de la Révélation, “l’enseignement de Moïse”. De la même manière qu’ailleurs, il dit ne pas être venu pour abolir la Loi mais pour l’accomplir. Accomplir quoi? Cette Promesse de Dieu de faire grandir l’humanité, d’assouvir sa soif de paix et de justice, et de le faire par la “Rencontre” personnelle avec le Dieu vivant. Ca, oui, il faut le garder et l’observer, sans cesse le vivre et l’approfondir.

Mais ces scribes et pharisiens qui se drapent dans les habits de la Loi n’ont rien compris. Ils s’habillent et se comportent comme s’ils étaient la Loi elle-même, comme si le fait de la connaître intellectuellement et savoir la transmettre leur conférait une quelconque importance. Ils induisent ainsi le peuple dans l’erreur, suggérant par leur attitude que Dieu ferait des différences entre ceux qui “savent” et ceux qui “ne savent pas”. Pire, ils s’isolent, derrière leurs beaux phylactères et leurs manteaux à frange, laissant croire aux autres que Dieu leur est inaccessible, qu’ils seront toujours en dehors, et puis jugés à décharge et forcément condamnés comme incapables d’appliquer les lois qu’ils professent. Or ces lois, non seulement ils ne les appliquent pas eux-mêmes mais en plus, pour la plupart elles ne viennent pas de Moïse, et quand elles viennent de Moïse (des cinq Livres de la Torah), elle s’appliquent à des contextes bien précis qu’il s’agit d’adapter à chaque nouvelle situation, conformément à la grande tradition de la transmission judaïque jusqu’à aujourd’hui. Car la Parole de Dieu est promesse créatrice, à l’oeuvre en tous temps en chaque coeur attentif à la laisser résonner en lui.

Ils élargissent leurs phylactères et rallongent leurs franges. La formule est intéressante. Les phylactères sont ces morceaux de parchemin, portés, par les juifs, sur le front ou le bras et contenant un verset biblique, moyen de se mettre en valeur, de se montrer comme se réclamant de la Loi divine. Ils se réclament d’une Loi dont ils s’érigent en spécialistes alors que, pris dans le tourbillon des applications procédurales de tous les cas de figure, ils en ont vidé l’Esprit.

Je voudrais m’attarder plus longuement sur les “franges”. Le mot grec employé par l’évangéliste est kraspedon, qui désigne les franges ou les bords du vêtement, et plus spécialement ces bouts de laine, assortis ou non de pompons ou de bouts tissés, autant d’accessoires sensés rappeler la Loi. Au demeurant, en faisant cela les scribes et les pharisiens appliquent à la lettre la Loi de Moïse telle qu’elle est exprimée en Nombres 15,38-41 et Deutéronome 22,12 : « Tu mettras des franges aux quatre coins du vêtement dont tu te couvriras ». Il est cependant clair que cette loi n’a rien à voir avec les 10 paroles reçues au Sinaï (les 10 “commandements”); ici, il s’agit d’un ensemble de prescriptions que la Bible dit données par Moïse au peuple suite à ses divers manquements, rebellions ou hésitations. Toutes ces règles, y compris celles qui codifient les vêtements ont pour but de signifier la sainteté de Dieu et du peuple qu’il s’est choisi. Toutes ont pour but d’aider à se rapprocher de Dieu, certainement pas celui de séparer et d’empêcher l’accès à Dieu.

Dans un article intéressant sur ce sujet, Le Monde de Demain précise : “À l’époque de Jésus, les pharisiens avaient déjà établi des règles sur la forme (rectangulaire) de ces vêtements, et sur la façon de fixer et de porter les franges. Cette sorte de cape était l’ancêtre du châle de prière, porté aujourd’hui par de nombreux pratiquants du judaïsme rabbinique. Les sources rabbiniques décrivaient cinq catégories de vêtements et d’accessoires que devait porter un Juif : ses chaussures, son couvre-chef, sa tunique, sa ceinture et ses sous-vêtements.

Le même article rappelle fort à-propos que ces franges étaient le rappel de l’Esprit de Dieu, on pourrait même dire de la Puissance de Dieu qui s’exprime et crée par la force de sa Parole créatrice. On comprend alors que Jésus s’en prenne à ceux qui usurpent cette puissance et l’utilise pour eux-mêmes au lieu d’aider le peuple à y trouver son réconfort et à en vivre. Un peu plus loin de le même chapitre, Jésus traite d’ailleurs les scribes et pharisiens d’hypocrites, d’engeance de vipères, avides de convertir des gens à leurs vues pour ensuite les culpabiliser par leurs manquements à observer les règles qu’ils ont édictées. En clair, il leur reproche de détourner la Parole de Dieu de son véritable objet.

L’article suppose également que Jésus portait les mêmes vêtements en usage en son temps, notamment quand il enseignait au Temple, et donc probablement ce vêtement à franges. A mon avis, cela n’est pourtant pas acquis du tout pour plusieurs raisons. La première est que Jésus s’est toujours montré libre par rapport aux usages de son temps (il parle à une Samaritaine, ses amis prennent du blé dans les champs, etc.). Ensuite, il s’en prend directement à ceux qui ont ce genre de pratiques, les scribes et pharisiens, pour s’en démarquer justement, et il est clair que Jésus n’est pas pharisien. Peut-être y a-t-il franges avec fioritures et franges toutes simples? Mais rien n’est précisé, nulle part les évangélistes ne s’attardent sur des vêtements rituels qu’aurait porté Jésus ; donc, n’inventons pas.

Cependant, il est très intéressant de noter que le même mot kraspedon est utilisé à plusieurs reprises pour désigner le bord du vêtement de Jésus (Mt 9,20 ; 14,36 ; Mc 6,56 ; Luc 8, 44). Et à chaque fois, il s’agit du geste de toucher le bord (les franges) du vêtement de Jésus pour être guéri. Qu’il y ait ou non des franges au vêtement de Jésus, cette proximité lexicale nous incite de toute façon à faire le rapprochement.

Mais toucher le bord ou les franges du vêtement de Jésus ne se fait pas du tout de la même manière que l’usage qu’il dénonce. D’abord, il ne s’en prévaut pas, ne les étale pas. Ensuite, c’est presque subrepticement que son manteau est touché par ceux qui reconnaissent en lui, vraiment, le Fils de Dieu, celui qui est habité par l’Esprit de Dieu. Il y a donc un enjeu clair de reconnaissance de la messianité De Jésus : eux, les scribes et les pharisiens, ils parlent,ils paradent mais ne sont pas habités – ne les imitez pas ! Lui, il parle, voyage, rencontre les gens dans leur humanité et ils LE reconnaissent comme Celui qui est habité par l’Esprit de Dieu, l’Oint, le Messie.

C’est en Luc 8,44 que le côté “subreptice” est le plus évident : une femme hémorroïsse s’approche par derrière, sans rien dire et touche le bord (kraspedon) du vêtement de Jésus. Le récit nous indique qu’elle guérit immédiatement de sa perte de sang mais surtout que Jésus sent comme une perte d’énergie, une force (dunamis) sortir de lui (Lc 8,46). Le reste de ce passage est également instuctif, Jésus se préoccupe de savoir qui l’a touché et la femme toute ‘tremblante”, nous dit le texte, reconnaît que c’est elle. Jésus, Fils de Dieu, incognito parmi les hommes, a alors cette formule bien connue, souvent reprise dans les Evangiles et que chaque croyant aimerait s’entendre à lui appliquée : “Ta foi t’a sauvée, va en paix !” (Lc 8,48)

Ta foi t’a sauvée“. Voilà bien l’enjeu. Si les scribes et pharisiens se décorent, pavanent, se montrent hautains et distants, comment les personnes du peuple auront-elles accès à Dieu? Jésus, lui, ne se prévaut pas d’une quelconque dignité (cf. Phil 2), il est l’un du peuple, il marche parmi le peuple. Il se rend accessible à tous et à chacun parce que c’est réellement le plan de Dieu que d’être accessible à tous et chacun.

Mais encore, pourquoi passe-t-il comme “incognito”? Pourquoi n’a-il pas un énorme phylactère sur le front qui serait haut comme deux étages et des franges qui volent au vent?… C’est que, SERIEUSEMENT, il s’est fait l’un d’entre nous. Cela le rend accessible et certains peuvent le reconnaître, oui. C’est bien, oui, mais Jésus demande souvent la discrétion à ce sujet, parce qu’il ne vient pas en Super-Héros, magicien ou Merlin l’Enchanteur, avec des franges magiques qui viendraient tout arranger…Non, mais…L’avez-vous envisagé SERIEUSEMENT ? Il s’est VRAIMENT fait l’un d’entre nous. Ce qu’il montre de lui, dans son humanité, c’est ce qui nous est offert à tous, à chacun.

Il n’y a plus de frontières qui tiennent entre Dieu et les hommes. Dieu habite au coeur de tous les hommes de bonne volonté qui se tournent vers lui.

Alors bravo à toi la femme hémorroïsse qui as cru que Dieu , en Jésus, est venu jusqu’à toi et qui as pu en toucher le bord du manteau, un bout de sainteté, et t’en es trouvée transformée. Mais en vérité, si tu l’écoutes, la reçois, la nourrit, cette sainteté est déjà en toi ! Jésus réconcilie l’homme avec Dieu non pas parce qu’il vient de l’extérieur dire quoi faire mais parce qu’il révèle que Dieu est déjà dans le coeur de l’homme et que son Esprit est déjà à l’oeuvre en quiconque l’accueille avec sincérité.

Les franges des scribes & pharisiens, les catholiques et l’homosexualité

J’en viens à un sujet plus polémique sur lequel j’espère ne blesser personne. Le pape François a soulevé d’énormes espérances par cette simple petite phrase à propos des homosexuels : “Qui suis-je pour les juger ?” Or, les résistances sont grandes au sein des communautés catholiques, clergé et paroissiens compris, pour entendre que la foi et la vie en Eglise n’est pas d’abord un ensemble de prescriptions juridiques ou morales à suivre, mais une vie fratenelle dans laquelle nous nous aimons, soutenons et exhortons les uns les autres dans l’Esprit d’amour du Seigneur Jésus.

Quand je reçois ce passage concernant les scribes et pharisiens, qui élargissent leurs phylactères et rallongent leurs franges, qui disent et ne font pas, qui font porter de lourds fardeaux aux autres pour “mériter” le ciel, comment ne pas penser à mon Eglise Catholique et à ces clivages qui la traversent depuis les débats autour du “mariage pour tous”, entre un clergé et parfois un magistère local qui condamnent vertement et sans nuances et des attitudes pastorales, douces, bienveillantes de nombreux pasteurs ? Comment ne pas penser aussi à cette hypocrisie dans laquelle sont engoncés de nombreux pasteurs qui doivent afficher formellement leur accord avec une doctrine encore officielle qu’ils ressentent pourtant comme inadaptée, injuste et non conforme à leur conscience ? Comment ne pas penser aux prêtres et religieux qui ont découvert ou accepté leur orientation sexuelle sur le tard – après l’idéalisation de la jeunesse et les années de de séminaire ou de noviciat – et qui se sentent écartelés, partagés, blessés, entre ce qu’ils découvrent d’eux-même, leur désir d’être vrai avec le Seigneur et ce qu’en dit ou montre leur Eglise? Comment ne pas penser aussi à ceux d’entre eux qui ont franchi le pas, parfois, d’avoir une double vie pour assumer leur besoin de tendresse? Et parmi ceux-ci, ceux qui cherchent une vie stable avec un compagnon qui leur apporte le complément que leur statut, nos communautés, l’Eglise, ne sait pas leur donner alors qu’il le vivent dans leur chair comme un besoin vital sans lequel ils meurent ou s’étiolent, se vident de leur existence ; ceux-là donc, mais aussi ceux qui ne peuvent plus tenir dans leurs voeux de chasteté et de continence et qui se laissent aller à une vie secrète et débridée où le sexe rapide devient l’échappatoire à leurs frustrations affectives?

Oui, comment ne pas y penser? Sans juger. Quiconque en est là est victime d’un terrible quiproquo de lui-même avec lui-même dont certains le pensent peut-être coupable mais dont il est d’abord la victime. L’isolement dans le ministère, les idéaux de jeunesse et le manque de maturité, le déni de l’homosexualité et le mauvais accompagnement durant les temps de discernement vocationnel et de formation, mais aussi la discipline actuelle de l’Eglise si loin de la réalité humaine et pastorale de nos contemporains – y compris de ceux qui exercent un ministère – ont conduit à tout cela.

Le plus douloureux pour moi, c’est de constater cette situation étrange où sont certains qui, le jour, sont chargés – ou se croient chargés – de réprouver l’homosexualité (attention, pas les personnes, hein ! seulement les actes !) et s’en acquittent fort bien, et, la nuit, ont une vie homosexuelle plus ou moins assumée, pas forcément épanouissante, loin de l’humanisation à laquelle ils aspirent à laquelle ils auraient pourtant droit… Le jour, la nuit… “Ils attachent de pesants fardeaux, difficiles à porter, et ils en chargent les épaules des gens” dit l’Evangile de ce jour… Le jour, la nuit… Comme ce théologien du Vatican, membre d’uns commission théologique prestigieuse, dont l’objectif est de garder la norme catholique (dont la norme hétérosexuelle) et qui vit une double vie en parallèle pendant des années. Je ne nie pas le côté douloureux qu’a dû vivre cet homme dans son écartèlement, et combien son coming out et son retrait du presbytérat ont dû être libératoires, mais est-ce que personne ne voit avec moi que cette situation est anormale – parce que déshumanisante pour tout le monde – et ne peut pas durer ?

J’ai mal à mon Eglise, parce que des gens souffrent, se blessent, mentent, se perdent dans toutes sortes de nuits alors qu’ils sont sensés indiquer la lumière. Peut-être que les normes disciplinaires, morales, mais aussi sacramentelles, ne conviennent plus aux temps qui sont les nôtres. D’ailleurs nos phylactères et nos grandes franges n’intéressent plus grand monde. Ce que cherchent nos contemporains, ce ne sont pas d’abord des règles, procédures et normes juridiques, ce qu’ils veulent c’est trouver du sens à leur vie quelque soit leur condition de vie, être rencontré par quelqu’un qui, indépendamment de son vêtement, est habité par le Dieu de miséricorde et de justice.

Certains parmi mes lecteurs sont concernés par les questions que je viens de soulever. J’espère ne pas les blesser et si c’est le cas, j’en demande pardon. Mon propos n’est certainement pas de juger et encore moins de condamner. Je sais trop, pour me l’appliquer à moi-même qu’on en est là où on en est. Non, je respecte toutes ces situations. J’alerte juste sur le fait qu’elles ne “devraient” pas exister et donc qu’elles nous invitent à penser une nouvelle manière de fonctionner qui incluent les situations qui sont aujourd’hui rejetées de fait par nos grands phylactères. Ma foi en Jésus-Christ me fait affirmer que chacun, prêtre ou non, a droit au bonheur et que nous en sommes, nous chrétiens, les témoins. Alors j’appelle de mes voeux une prise de conscience et une réforme dans l’Eglise Catholique qui permettrait de sortir des logiques identitaires et de reproduction à l’identique pour passer à une approche pastorale telle que le Christ nous l’a montrée quand il parcourait les routes de Palestine et d’Israël sans se préoccuper de savoir si les franges de son vêtement – c’est-à-dire de son humanité – étaient aux normes.

Z- 5 nov 2017

 

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Nota Bene: Il y a quelque temps, quelqu’un (un prêtre?) m’a demandé si je pouvais publier mes commentaires bibliques avant la fin du jour où ils sont proposés à la liturgie. Je m’étais promis d’essayer mais, d’une part, ils sont souvent le fruit de ma propre méditation le jour même, et, d’autre part, le temps de l’écrire et publier…le jour ou les jours passent. 🙂 Désolé… Avec mon emploi du temps actuel, je ne peux pas prendre l’engagement de publier à l’avance selon une temporalité définie. Mais je remercie ce lecteur attentif et attentionné, qui se reconnaîtra.

Source photo : photo Israël sur cadenaser.com

“Je veux chanter pour mon ami le chant du bien-aimé à sa vigne.” (Isaïe 5,1)

Evidemment, recevant la lecture de ce texte, ce dimanche, je m’interrogeais sur la nature de cet ami qui aime une vigne dont il prend soin et qui ne produit pourtant pas de bons fruits.

Je veux chanter pour mon ami le chant du bien-aimé à sa vigne.

Mon ami avait une vigne sur un coteau fertile.
Il en retourna la terre, en retira les pierres, pour y mettre un plant de qualité.
Au milieu, il bâtit une tour de garde et creusa aussi un pressoir.
Il en attendait de beaux raisins, mais elle en donna de mauvais.
(Is 5,1-2)

Dans certaines traductions, on répète deux fois ami ou bien-aimé, mais le texte hébreu apporte pourtant une nuance.

Je veux chanter (ou je chanterai) pour mon ami (yedid) le chant du bien-aimé (dodi) à sa vigne. (Isaïe 5,1)

Les deux mots Yedid et Dodi ont la même racine (Dowd), mais puisque le texte hébreu les distingue, tentons de comprendre cette nuance et de percer la profondeur de cette simple phrase.

Yedid est assez peu employé dans la Bible (8 fois seulement) et, surtout dans les Psaumes, pour désigner l’amour et les bien-aimés : « De tes demeures sont aimables, Seigneur, Dieu de l’univers ! » (Ps 83, 2/84,2)

Dodi est plus courant dans la Bible Hébraïque et est surtout abondamment utilisé dans le Cantique des Cantiques comme par exemple en 2,8 : C’est la voix de mon bien-aimé (Dowd) ! Le voici, il vient, Sautant sur les montagnes, Bondissant sur les collines. Ou en 4,10 : Que de charmes dans ton amour (Dowd), ma soeur, ma fiancée ! Comme ton amour (Dowd) vaut mieux que le vin.Ou encore en 5,2 : C’est la voix de mon bien-aimé (Dowd), qui frappe. Et bien d‘autres.

Il semble y avoir un peu plus de neutralité dans l’amour exprimé par le terme Yedid, moins de passion. Alors que Dodi nous introduit dans la passion amoureuse et le désir de l’autre, au premier chef dans le Cantique des Cantiques mais aussi dans tous ces autres passages où il est employé pour désigner la parenté, les bien aimés de la famille.

Les spécialistes disent que la racine Dwd désigne le fait de bouillir, belle image pour dire l’amour qui relie les uns aux autres et qui explique son emploi dans le Cantique des Cantiques.

Revenons à Isaïe

Je chanterai pour mon ami (yedid) le chant du bien-aimé (dodi) à sa vigne. (Isaïe 5,1)

Qui est cet ami ? Est-ce le bien-aimé lui-même ? Chanterai-je à mon ami l’histoire de son amour ?

Ce serait déjà un beau chant d’action de grâces, puisque je chanterai alors que, dans son amour, il a désiré, il a voulu, produire du bien et a travaillé en ce sens. Hélas en vain. Mais tout l’amour investi dans la relation avec sa vigne (qui désigne ici les habitants de Jérusalem – dixit Isaïe -, donc Israël, et donc les enfants de la Promesse, les bien-aimés du Seigneur), ne s’est pas donné en vain. Dieu a voulu entrer en relation et il en attendait du retour. La suite du texte est explicite sur ce sujet : la vigne, c’est la maison d’Israël qui s’est détourné de l’amour du Seigneur et ne produit plus de fruits.

Dieu, ce bien-aimé magnifique, nous désire et attend de nous une réponse à son offre passionnée et aimante.

Mais encore, qui est cet ami ? Dieu se parle-t-il à lui-même ? « Je chanterai à mon ami, le chant du bien-aimé ».

L’étymologie nous suggère que cet ami est celui qui est aimé, celui qui est déjà dans l’amour, d’une manière certaine et pacifiée.

Alors, on pourrait comprendre qu’Isaïe nous dit : je vais chanter pour les aimés du Seigneur [ceux qui sont déjà dans l’amour du Seigneur] combien son amour le porte à désirer quiconque n’y est pas encore et combien il est prêt à s’investir jusqu’au risque de l’échec dans l’aventure de cet amour qui se donne sans être certain du retour.

C’est une interprétation libre, évidemment. Chacun en pensera ce qu’il veut.

Mais moi je me dis que tantôt je suis cet ami à qui le Seigneur peut parler en toute confiance et sérénité et tantôt ce bien aimé si désirable qui ne sait pas encore qu’il est désiré et qui doit sentir ce souffle bouillonnant qui lui est adressé. Les deux.

Jésus, lui, il est aussi les deux, d’une manière unifiée et qui nous montre l’exemple. Il est la vigne désirée qui répond en donnant du fruit : « moi je suis la vraie vigne et mon père est le vigneron. » (Jn 15,1)

Et il est aussi l’homme d’un grand désir : « Il leur dit : « J’ai désiré d’un grand désir manger cette Pâque avec vous avant de souffrir ! Car je vous le déclare : jamais plus je ne la mangerai jusqu’à ce qu’elle soit pleinement accomplie dans le royaume de Dieu. » (Luc 22,15-16)

Quand je me sens seul et si peu aimable ou si peu aimé, il me reste toujours le secours d’entrer dans l’amour de plus que grand que moi qui habite en moi et de lui laisser encore davantage de place. Il me désire et je sens son désir bouillonnant me réveiller et m’attirer vers lui. Il m’apaise en m’apportant ce réconfort qui vient de l’intérieur, qui fonde une relation pérenne et permet d’accueillir l’autre en vérité pour ce qu’il est : un bien-aimé du Seigneur, quand bien –même cet autre ne le saurait pas.

Pas sûr que ce que je vous raconte soit intéressant, mais j’avais envie de partager mes élucubrations. Depuis que j’ai entendu cette phrase : « Je veux chanter pour mon ami le chant du bien-aimé à sa vigne. », il me semble entendre le désir de Dieu. Pas mon désir de lui. Son désir à lui de moi. Et ça me ravit.

Notre Dieu, c’est le Dieu du désir.

Source photo : nomadicboys/

« Ton regard est-il mauvais parce que moi, je suis bon ? » (Mt 20, 15)

En méditant l’Evangile de ce jour, je me suis arrêté sur cette phrase qui souvent passe inaperçue dans cette parabole des ouvriers de la dernière heure.

Comme souvent, les paraboles sont subtiles et peuvent s’entendre à différents niveaux. Avec celle-ci on peut discourir sur la justice rétributive ou pas, sur le sens de la parole donnée, sur la miséricorde qui agit jusqu’à la dernière heure, et sur plein d’autres choses encore.

Mais finalement cette phrase que le maître de la parabole adresse à celui qui récrimine de n’être pas rétribué davantage alors qu’il a travaillé depuis le matin, sonne soudain comme la réponse du père au fils aîné qui dans la parabole de l’enfant prodigue récrimine lui aussi contre son frère – et son Père – et refuse de venir à la fête.

C’est de cela qu’il s’agit : venir à la fête.

Se réjouir de toute avancée, de toutes retrouvailles, même ultimes, même dernières.

Ce Dieu-là désire d’un grand désir retrouver tout être humain, rassembler toute la famille de ces êtres si désordonnés parce que libres d’aller où ils veulent, et pour qui il est si dur de retrouver le chemin de la maison.

Si l’on aime Dieu, si l’on est bien entré dans sa compagnie et qu’on en partage quelque peu les vues, il ne peut pas y avoir de réelle joie tant que tous les êtres humains ne sont pas assemblés en communion.

Alors, être le premier, être le dernier, cela n’a pas beaucoup de sens. Être, seulement, voilà la grande aventure. Et tout être vivant de se réjouir des retrouvailles qui marquent, pour qui que ce soit, la fin de l’errance et le retour à la maison familiale.

Sérieusement, qui ne s’est pas réjouit de la même manière, avec la même intensité, de retrouver l’ami qui arrive tard à la soirée parce qu’il n’a pas pu se libérer avant? Faut-il que les premiers convives se vexent d’être délaissés parce qu’on accueille celui qui vient et sans qui la fête n’aurait pu être complète ? Ces jalousies, ces rivalités, ces comparaisons indiquent que le chemin spirituel n’est pas terminé.

Revenons à cette phrase de l’Evangile du jour : « Ton regard est-il mauvais parce que moi, je suis bon ? » Oui, il arrive qu’on ne supporte pas la générosité, la magnanimité, la miséricorde. Oui, il arrive qu’on ne supporte pas la bonté, la gentillesse et le bien qui est fait. Peut-être à cause d’un vague sentiment qu’on nous “vole ” quelque chose, à moins que ce ne soit une inconsciente et malsaine comparaison qui nous fait sentir que nous ne sommes pas cet homme de bien que nous aimerions ou que nous prétendons être.

La bonté dérange quand on s’imagine qu’elle est un bien à acquérir comme on acquiert une terre, un mérite, une décoration. C’est évidemment une fausse piste. Quand il s’agit d’être, il n’y a rien à prendre, rien à envier. Au mieux on peut s’inspirer de la personne qui nous montre ainsi le chemin et puiser comme elle à la source intérieure qui lui fait poser des actes sans importance – sans importance parce que s’écoulant naturellement de l’être.

De Jésus, Pierre apportera ce témoignage qu'”il est passé parmi nous en faisant le bien” et pourtant peu l’auront reconnu. Et parmi ceux qui l’auront reconnu, il y a aura ceux qui n’ont pas pu le supporter et qui le mettront à mort.

Y a-t-il un phénomène similaire dans l’homophobie ambiante que l’on trouve dans certains milieux catholiques? Ces personnes, se pensent-elles plus méritantes? Se sentent-elles remises en cause par le fait d’avoir et d’afficher une orientation sexuelle différente ? Qu’est-ce que cela remue au plus profond d’elles-mêmes ?

Jusqu’à preuve du contraire, elles n’ont pas été instituées garantes des droits de Dieu et le seraient-elles qu’il faudrait encore qu’elles l’écoutent en leur coeur, qu’elles se souviennent que nous ne sommes que des pérégrinants sur cette terre, et que Dieu se présente à nous selon bien des formes, qu’il ne nous appartient pas et se dit parfois par le sensus fidei au-delà de ce qu’on imaginait. Les premiers apôtres, Pierre, Paul, Philippe et les autres, ont ainsi fait l’expérience à maintes reprises que l’Esprit du Seigneur les précèdait parfois en des lieux et personnes qu’ils n’imaginaient pas.

La vérité est que les personnes LGBT sont attendues aux noces du Royaume autant que les autres. Ce n’est pas nous qui invitons, c’est le Seigneur lui-même. Il serait bien mal venu de faire la lippe parce que cela ne nous convient pas.

Si Dieu est bien le Dieu de tous, et si les personnes homosensibles ou transgenres font cette expérience éminemment intime, intense et intérieure, d’être aimées de Dieu telles qu’elles sont, si Dieu donc manifeste ainsi sa bonté envers tous, qu’est-ce donc que ce regard mauvais chez certains comme si on leur enlevait quelque chose ou comme si leur monde s’écroulait ? Pourquoi?

Si c’est le cas pour toi qui lis ces lignes, oui, pourquoi ? Qu’est-ce que ça dérange en toi?

« Ton regard est-il mauvais parce que moi, je suis bon ? » (Mt 20, 15)

Photo : photo de presse (Reuters/Alexander Demianchuk) prise lors d’une répression de manifestation LGBT en Russie.

En ce temps-là, Jésus leva les yeux au ciel et dit : « Père, l’heure est venue.Glorifie ton Fils afin que le Fils te glorifie. Ainsi, comme tu lui as donné pouvoir sur tout être de chair, il donnera la vie éternelle à tous ceux que tu lui as donnés. Or, la vie éternelle, c’est qu’ils te connaissent, toi le seul vrai Dieu, et celui que tu as envoyé, Jésus-Christ.»
(Jean 17, 1-3)

L’heure est venue…

Voilà deux semaines de suite que la liturgie dominicale nous offre des textes bien compliqués pour qui n’est pas introduit à saint Jean et, au delà, à la tradition hébraïque. Saint Jean est truffé de références à l’ancien Testament d’une manière très subtile, comme si ses interlocuteurs avaient déjà intégré spirituellement le message biblique. Il y a toujours un triple niveau de langage chez saint Jean: l’histoire qu’il raconte, le contenu spirituel auquel il renvoie, promesse de Dieu en train de s’accomplir, et ultimement le renvoi à son actualisation dans l’aujourd’hui et le maintenant du lecteur.

Alors, « l’heure est venue »… Dans le récit johannique, c’est d’abord l’annonce de la Passion. Mais c’est aussi le renvoi au contenu spirituel que porte la tradition biblique. Dans la Bible, le temps appartient à Dieu. Bien avant que les philosophes contemporains ne comprennent que le temps va de pair à la création, les chercheurs de Dieu ont compris que le temps concourrait au plan de Dieu dans l’ordre de la création. Ils l’ont compris avec leur humanité, ce qui fait qu’indistinctement ils découvrent que Dieu accorde un temps de grâces et de bienfaits, ou bien un temps de famine et de désolation.En fait, Dieu s’accomplit à travers les temps de la création.

Comme l’écrit très bien Véronique Margron, suite à la Promesse que Dieu non seulement ne nous abandonnait pas mais allait faire route avec nous jusqu’à faire sa demeure parmi nous, “Il y a eu la longue attente du peuple du Premier Testament, l’attente de la Rencontre durant l’Exode, puis le Temple de Jérusalem. Mais tous espéraient l’Alliance Nouvelle où Dieu demeurerait dans l’âme des siens, intimement présent.”

L’heure est venue de cette rencontre ultime par laquelle désormais tout homme aura accès à Dieu puisqu’il saura en l’exemple de Jésus-Christ que Dieu est le Déjà-Là de son existence qui l’attend patiemment, qui attend que l’homme vienne à lui.

Toi, qui que tu sois, y compris si tu t’interroges à cause de ce que tu découvres de toi en ton orientation sexuelle, sache-le bien : l’heure est venue pour toi aussi. Il n’y a de restriction pour personne à ce temps qui surgit du fond de toi.

Le pouvoir sur tout être de chair

J’aime bien cette nouvelle traduction “sur tout être de chair”. Auparavant on disait: “afin que ton fils te glorifie et que, selon le pouvoir sur toute chair que tu lui as donné, il donne la vie éternelle, etc.”

La formule “le pouvoir sur toute chair” rendait mieux compte de la traduction grecque mais butait sur les connotations actuelles du mot chair. Chair, on le confond rapidement avec corps, et si l’on parle de résurrection, avec la résurrection des corps, comme si les morts allaient sortir de leur tombeaux. Or la foi catholique affirme la Résurrection de la chair, pas celle des corps. Vision mécaniste de la résurrection qui n’honore pas bien la dimension spirituelle toujours présente dans l’hébraïsme. Le mot hébreu “basar” qui désigne la chair est bien plus riche que la seule désignation du corps physique, il désigne l’être profond, la substance, l’essence-même de l’être dans toute sa consistance, y compris les énergies subtiles, et ce principe d’éternité auquel Jésus fait allusion dans le même texte d’Evangile que celui cité en exergue. On comprend mieux alors le mot résurrection : ressuscité, c’est être re-suscité.

Le mot hébreu “basar” a d’ailleurs un autre sens que “chair”, il signifie aussi annonce, bonne nouvelle, nouvelle joyeuse. A peu près l’équivalent du mot “Evangile”, en grec. Et cette nouvelle, cette annonce, qui est aussi chair, elle est finalement le “principe” de l’existence, ce qui est premier et avant toute chose dans le Vivant. Au commencement était le Verbe, dit saint Jean…

L’expression “pouvoir sur toute chair” avait un autre inconvénient. Avec des siècles de théorisation sur le “péché de la chair”, on voit bien à quel style de condamnations ou, pour le moins, de moralisations cela pouvait conduire. Or, ni en grec ni en hébreu, le mot “chair” n’a de connotation sexuelle. Le pouvoir sur toute chair n’est pas un pouvoir qui consisterait à dire ce qui est permis ou non permis en matière sexuelle ou autre. C’est un pouvoir sur le vivant entier, sur le principe de vie, sur la présence divine en chacun. Présence qui désormais peut se libérer et grandir puisque nous savons que le Christ assume notre humanité de l’intérieur.

La formule “l’être de chair” a donc cet avantage d’insister sur ce qu’il y a de fondamental en chacun, avant toute forme d’incarnation : nous sommes des êtres, des êtres voulus par Dieu, voulus pour sa gloire.

Quant au mot “pouvoir”, il ne faut pas se tromper non plus, ce n’est pas le pouvoir au sens de puissance, mais au sens de capacité. Il ne s’agit pas de contraindre quelqu’un par la force mais d’une capacité à le révéler pleinement.

« Glorifie ton Fils afin que le Fils te glorifie.»

Là encore, Jean emploie un mot grec,doxa, qui renvoie à un mot hébreu, kabod. Or si kabod désigne la révérence, les honneurs, la gloire, il désigne aussi la prospérité, la richesse, la splendeur ou la dignité. Pour traduire, il faut bien trouver un mot et on a donc pris “gloire” mais en vérité cela est bien réducteur. Le mot kabod renvoie à la divinité elle même, dans le fait qu’elle est, tout simplement, sans avoir rien à justifier ni quémander.

C’est le sens profond du tétragrammme YHWH auquel Jésus fait d’ailleurs allusion plus loin, dans le même passage d’Evangile lorsqu’il dit : “J’ai manifesté ton nom aux hommes”.(Jean 17,6)

Dieu est. Et il est au principe de toutes choses. Glorifier Dieu, c’est le laisser être en nous et se déployer pour notre plus grand bonheur. Pour le lecteur non-chrétien qui viendrait sur cette page, je précise: il ne s’agit pas d’un esclavage ou d’une dépendance ; non, il s’agit bel et bien d’une libération. Car sans être “connecté” au principe de vie qui nous donne l’existence, nous passons notre temps à nous heurter à des murs, à vouloir être par nous-mêmes, à confronter notre orgueil à celui des autres, dans la souffrance, la guerre, l’opposition, le jugement.

Toi qui es homosexuel, où que tu en sois de cette découverte, sache le bien : Dieu se réalise en toi à travers ce que tu es. Il n’y a pas de condamnation concernant ce que tu découvres de toi. En acceptant qui tu es, tu révèles la Présence de Dieu en toi.

La vie éternelle

Logique avec ce qui précède : la vie éternelle, c’est qu’ils te connaissent, toi le seul vrai Dieu, et celui que tu as envoyé, Jésus-Christ.

Nous savons maintenant que le mot chair est bien plus consistant et subtil que la seule “chair” physique, nous savons qu’elle englobe ce qui maintient l’être et l’existence. Nous avons là le principe de notre origine et de notre fin ultime : nous sommes faits pour la vie éternelle.

Dans ce texte d’Evangile, Jésus rappelle qu’il fût avant le commencement du monde: “Et maintenant, glorifie-moi auprès de toi, Père, de la gloire que j’avais auprès de toi avant que le monde existe.“(Jean 17,5), ce qui rappelle le Prologue de l’Evangile de Jean : “Au commencement était le Verbe.”

Jésus revendique cette “gloire” d’être pleinement en Présence de Dieu. Pas une présence extérieure à lui, mais une présence intérieure, intime et complète. En une succesion d’affirmations distillées tout au long de ce passage d’Evangile, il dit:

« Je t’ai glorifié sur la terre en accomplissant l’œuvre que tu m’avais donnée à faire…
J’ai manifesté ton nom aux hommes que tu as pris dans le monde pour me les donner…
Je leur ai donné les paroles que tu m’avais données…
je prie pour (…) ceux que tu m’as donnés, car ils sont à toi…
je suis glorifié en eux…
Désormais, je ne suis plus dans le monde ; eux, ils sont dans le monde,
et moi, je viens vers toi. »
(Jean 17, 1b-11a)

La vie éternelle, c’est adhérer au principe de vie qui nous fonde et l’honorer de l’intérieur en le laissant s’épanouir complètement à tel point qu’on puisse ressembler à ce qu’on disait de Jésus dans la première communauté des chrétiens : “Il est passé parmi nous en faisant le bien.” Sa vie entière était tournée vers le bien et c’est ainsi qu’il honorait le Nom de Dieu qu’il portait au plus intime de lui-même.

Non seulement la vie éternelle est une Promesse mais elle est déjà là. La véritable question est : sommes-nous capables de nous conduire en enfants de cette Promesse déjà réalisée?

Toi qui es homosexuel et doutes parfois de l’amour de Dieu, entends cette promesse. Elle n’est pas conditionnée par l’acceptation des groupes humains, à leurs faiblesse, leurs limites et parfois leur bêtise.Si tu écoutes au fond de toi, tu dois bien sentir que cette Promesse ne vient pas de l’extérieur et que la voix ou la musique qui la portent, ont des accents de vérité et de profondeur incomparables avec les rumeurs de la foule ambiante. Tu es le seul à pouvoir accéder à cette vérité, à ces mots doux qui sourdent de l’intérieur et qui viennent confirmer que tu es promis à la vie éternelle. Ne t’en prive pas !

Z- 27 mai 2017

Source photo : Charlie et Alex Kotze

“A leur tour, ils racontèrent ce qui s’était passé sur la route, et comment le Seigneur s’était fait reconnaître par eux à la fraction du pain.” (Lc 24, 35)

M’intéressant à ce que pourrait-être une spiritualité gay (voir ici), je me suis parfois interrogé sur ce que cela changerait si on découvrait que les deux compagnons d’Emmaüs partageaient la condition homosexuelle et étaient, en fait, des compagnons de vie. Après tout, ils cheminent ensemble, vivent ensemble, accueillent Jésus dans “leur” maison… [Mais non, je plaisante ! rien dans le texte n’indique que c’était une maison commune, sinon les circonstances qui les présentent tous trois dînant ensemble en un même lieu, sans aucune mention de serviteurs, familles ou autres personnages.]

Précisons d’emblée que l’orientation sexuelle des pèlerins d’Emmaüs, quelle qu’elle soit, ne change rien au contenu de la foi enseigné par ce passage. Il n’y a pas de différence à chercher dans l’annonce de la Bonne Nouvelle. Si différence il y a, elle est plutôt dans la réception, la façon dont chacun, dans les circonstances culturelles et historiques qui sont les siennes, dans sa spécificité, va le recevoir, se laisser toucher et éclairer dans la condition qui est la sienne.

Alors, en ne cherchant pas ici la vérité historique mais le sens spirituel de ce passage, imaginons quand même que ces deux compagnons aient pu avoir une orientation homosexuelle. Et, en le recevant avec le coeur et la culture d’un chrétien homosexuel qui écoute la Parole et en attend un éclairage pour sa vie d’aujourd’hui, laissons-nous instruire.

Deux hommes, membres d’un groupe de disciples

La première chose qui me frappe est que, même si la péricope est centrée sur leur rencontre avec le Christ, ces deux hommes sont loin d’être isolés. ils font partie d’un groupe, disent-ils eux-même, dans lequel on trouve les apôtres et des femmes.

Ce groupe de disciples, nous le connaissons. ce sont les amis de Jésus, ceux qui ont en confiance en Lui, ceux qui l’ont rencontré et se sont mis à le suivre. On y trouve les apôtres mais aussi toute cette humanité qui a accueilli la Bonne Nouvelle du Salut. Peut-être y a-t-il une femme pécheresse, un lépreux guéri, un aveugle de naissance qui a retrouvé la vue, un boiteux relevé de son infirmité, un savant prudent qui cherchait la la vérité, et plein d’autres. Aussi, peut-être des personnes avec une orientation homosexuelle.

Aujourd’hui, en tout cas, pour ceux qui sont concernés par cette question, c’est le cas. Ce groupe est assez divers et spécifique en même temps pour que je comprenne que qui que je sois, j’y ai ma place. Le seul critère qui compte est la confiance et l’adhésion à cet homme étonnant qui nous parle de Dieu, Jésus, et qui semble nous réconcilier à la fois avec l’image que nous avions de Lui et, à vrai dire, avec l’idée que nous avions de notre présence en ce monde. Le sens de la vie.

Cela est toujours vrai. Peu importe qui critique, qui méprise, qui rejette, fût-ce même avec des arguments d’autorité que l’on croit à tort tirés des Ecritures ; les Evangiles attestent maintes fois que Jésus doit réexpliquer les Ecritures à tous ces bons juifs – pharisiens, sadducéens, esséniens, etc. – qui croient la connaître et en font même profession.

Seul compte l’attachement au Christ et à cette Révélation que, aujourd’hui, le Salut est venu pour nous et ce, sans conditions. Juste l’acueillir.

Donc, si je suis homosexuel, je peux être convaincu que Non seulement le Christ ne me condamne pas, ni ne me juge, mais bien plus encore qu’il m’accueille tel que je suis me demandant juste de vivre en enfant de Dieu, en vérité, dans la paix et la justice.

“Nous, nous espérions que c’était lui qui allait délivrer Israël.”

Délivrer Israël.. de quoi? Des Romains, de la dynastie royale non davidique, des grands prêtres, des pharisiens ? De la corruption, l’injustice, l’infamie? De la pauvreté, la misère, la souffrance ? Les disciples d’Emmaüs parlent de leur espoir, comment il s’est arrêté brutalement avec l’arrestation et la mise à mort de leur chef, mais on est peu renseigné sur la nature de leurs espérances déçues.

Imaginons la scène transposée aujourd’hui. Quelles seraient les espérances de personnes homosexuelles en proie à une contradiction permanente concernant leur orientation, le dédain auquel elles font face, les plaisanteries homophobes, les sourires en coin, cette condescendance envers elles sur l’air d’une tolérance envers ces “pauvres” qui ne sont pas comme les autres ? Qui est différent de qui, ça se discute, non?

Oui, il y a de quoi espérer d’être délivré. Pouvoir enfin être autorisé à être qui on est, à ne pas être jugé sur l’orientation sexuelle, tout simplement parce qu’on ne la choisit pas et qu’elle n’est en rien un critère pertinent pour déterminer qui serait plus humain qu’un autre.

Ce Jésus qui s’est montré si attentif aux fragiles et aux pauvres, ce Jésus qui en fait ses amis privilégiés, nous l’avons suivi nous aussi. Nous espérions qu’il lève enfin l’opprobre que les hommes lancent si facilement sur les autres. Nous espérions être les bienvenus, nous espérions être invités au banquet, nous attendions le Royaume dont il disait : “Voilà, il est déjà là.”

Mais ils l’ont condamné. Tué. Alors, qu’en est-il de nos folles espérances? Le système est-il toujours plus fort ?


“Il leur interpréta, dans toute l’Écriture, ce qui le concernait.”

Tentation du repli. Tentation de s’enfuir tristement et reprendre une vie monotone. Mais non, vous aviez raison d’espérer. Faut-il qu’un étranger vous le redise, vous confirme dans votre joie d’enfants émerveillés? Cet étranger, c’est chaque rencontre, chaque occasion, de ré-interroger les rêves les plus beaux et les plus fous qui ont allumé en nous le désir de vivre et d’avancer.

Alors, il est utile, oui, de relire les Ecritures à la lumière de la Résurrection et de la Promesse de Vie qui animait le petit groupe dont je parlais plus haut. Les Ecritures nous sont parfois hermétiques, susceptibles de différents interprétations, leur sens se refuse à l’orgueilleux qui aimerait les comprendre pour se sentir puissant ou s’en faire un pouvoir sur les autres. Mais, à qui reste attaché à la Promesse de Vie que Jésus a partagée avec les siens, les Ecritures restent le chemin qui dit l’Amour de Dieu.

Fort de la Résurrection du Christ, nous savons que tout homme et toute femme qu’il a accepté dans son compagnonnage est entraîné dans la même folie de Dieu qui nous veut vivants. Nous savons-mêmes que nous ne sommes pas des privilégiés, juste les premiers témoins et que si c’est vrai pour nous, c’est vrai pour toute l’humanité.

Voilà donc la Nouvelle : si j’accepte d’être aimé par Dieu, tout homosexuel que je sois, et si je ne le vis pas seulement comme la consolation qui me serait donnée pour panser mes blessures mais comme l’élan vital qui me fonde et m’entraîne en avant, je deviens à mon tour témoin de la Bonne Nouvelle pour d’autres, homosexuels ou pas. A vrai dire, je le deviens déjà pour mes frères chrétiens qui se sentent réprouvés dans leur foi à cause de leur orientation homosexuelle, et c’est déjà pas si mal, sûrement nécessaire. Mais cela l’est aussi pour tous ceux et celles qui sont perdus dans leur quête existentielle, prisonniers de leurs esclavages, blocages, manques de sens et d’amour parce qu’ils ne savent pas qu’ils sont irrémédiablement aimés. Voilà en quoi consiste la délivrance. Se savoir aimés.

Montrer que nous nous savons aimés, que la Promesse de Dieu est réalisée, voilà la Délivrance.

“Alors leurs yeux s’ouvrirent, et ils le reconnurent, mais il disparut à leurs regards. Et ils se dirent l’un à l’autre :”Notre cœur n’était-il pas brûlant en nous, tandis qu’il nous parlait sur la route et nous ouvrait les Écritures ?”

Il fallait tout cela pour en arriver là. Il fallait aux pèlerins d’Emmaüs avoir suivi Jésus sur les chemins de Palestine et d’Israël, s’être attaché à lui, lui avoir accordé leur confiance ; il fallait avoir semblé le perdre, être confrontés à leurs désillusions et leur rêves déçus, il fallait qu’il leur soit arraché en quelque sorte, pour qu’ils puissent faire l’expérience de le rencontrer à nouveau mais autrement ; il fallait tous ces renoncements pour que leur coeur soit tout brûlant à nouveau et qu’a posteriori ils sachent qu’il les avaient rejoints et confirmés dans leur appétit fondamental de vie.

L’homosexualité a pu être ressentie comme une souffrance, une blessure, une tare, que sais-je. D’abord par autrui, par la culture ambiante, mais, comme le regard des autres nous importe à l’âge où l’on se structure, par soi-même aussi. Ami qui souffre de te découvrir homosexuel, ne t’enferme pas dans le jugement de toi-même ni dans le déni, regarde seulement ce qui te rend heureux. Quand ton coeur a-t-il été tout brûlant en toi, de cette chaleur qui vient d’ailleurs tout en étant et toi, et qui t’entraîne à te savoir pour un bonheur qui et dépasse et qui t’est promis? L’homosexualité , ce n’est pas d’abord des choses sexuelles, c’est d’abord sentir au fond de soi un désir de vivre et d’être heureux et de constater qu’il s’exprime préférentiellement avec une personne du même sexe.

Si tel est le cas, si ton coeur a été brûlant, s’il tu t’es trouvé révélé à toi-même par l’amour d’une personne du même sexe et tout chaviré par cette découverte, ne crains pas. Il y a une promesse de bonheur incluse dans cette découverte-même et la question est peut-être simplement : “Maintenant , que vais-je faire de ce trésor?”

On me demandera peut-être si je ne confonds pas le fait d’avoir le coeur brûlant à cause du Seigneur et celui d’avoir le coeur brûlant parce qu’on tombe amoureux. Non, je ne confonds pas. Il restera toujours qu’on peut avoir ce genre de’expérience spirituelle en dehors de toute question liée à l’orientation sexuelle, ce qui confirme au passage que la question d’être ami de Dieu n’y est pas liée. Mais il demeure aussi que la rencontre avec le Seigneur est souvent une rencontre amoureuse. Elle n’est pas seulement la survenance d’un fait extérieur, elle est inondation de l’intérieur par une présence qui avait toujours été là mais qui ne nous était pas – pas assez – perceptible.

Cette découverte qu’on dit mystique et qui en fait est si simple n’a, en soi, rien à voir avec l’orientation sexuelle. Mais force est de constater qu’un certain nombre de croyants confrontés à leur homosexualité, fût-ce au prix du déni comme je l’ai été, structurent leur représentation de l’amour de Dieu à travers le filtre idéalisé de l’amour qu’ils s’interdisent : l’ami idéal, l’amant mystique, le Bien-Aimé. Là, dans le secret de leur coeur, l’Amour interdit peut devenir possible parce que c’est celui de l’Ami fidèle et parfait. Ce n’est ni bien ni mal, cela se passe quelquefois ainsi, c’est tout, et on n’en prend conscience que plus tard.

Pour ceux qui sont dans ce cas, ne craignez pas d’être dans la confusion. La découverte de votre orientation sexuelle étant en apparente contradiction avec votre culture et votre éducation, vous avez développé une sensibilité à l’amour de Jésus comme un ami, un frère, qui vous apportait compréhension, consolation et tendresse, vous vous êtes structuré sur cette représentation, et elle n’était pas fausse, elle était vraie. Elle correspond à la manière dont, dans votre situation très particulière (mais toute situation est particulière 🙂 ) Jésus est venu à vous.

Alors, si votre coeur était brûlant quand vous vous êtes senti aimé tel que vous étiez, avec votre orientation sexuelle, accueillez cette expérience comme confirmation de l’amour de Dieu à votre égard tel que vous êtes.

“À l’instant même, ils se levèrent et retournèrent à Jérusalem. (…) Ils racontaient ce qui s’était passé sur la route, et comment le Seigneur s’était fait reconnaître par eux à la fraction du pain.”

La découverte des pèlerins d’Emmaüs les remet en route, ils repartent à Jérusalem, ils réintègrent la communauté plus grande et diverse des croyants. Ils témoignent , eux aussi, qu’ils sont aimés du Seigneur, et ce témoignage est autant valable que celui des autres.

Pourtant, ils avaient eux-mêmes entendu les témoignages des femmes et des premiers disciples arrivés au tombeau. Ils avaient entendu, ils savaient. Mais cela ne les avait pas empêchés de repartir tout tristes vers leur village d’Emmaüs. Pourquoi? Parce que savoir et expérimenter, ce n’est pas la même chose. Ils n’avaient pas encore goûté la présence du Ressuscité, il n’avaient pas encore expérimenté la Résurrection en leur vie.

Ami chrétien, qui te sens peut-être perturbé par la découverte ou l’acceptation de ton homosexualité ne perds pas courage. Apprends que le Seigneur Ressuscité ne pourra te visiter et te confirmer en ton être que si tu sais y demeurer toi aussi. Il y a là une source inépuisable d’amour qui s’écoule d’elle-même et donne la force de courir rejoindre le reste de l’humanité, à commencer par sa propre humanité.

Un mot encore sur la fraction du pain – puisque c’est à la fraction du pain qu’ils le reconnurent. Bien sûr, l’Eglise y voit une annonce eucharistique, ce qui laisse imaginer soit que les disciples étaient présents lors de la dernière Cène, soit qu’elle leur avait déjà été racontée (c’est bien rapide!), soit que l’Evangéliste qui écrit postérieurement aux événements ait été influencé par les rites déjà existants de la première communauté lorsqu’il a rédigé ce passage. Il en ressort que même si ce repas ne pouvait pas être une Eucharistie, au sens de messe telle qu’on la pratique aujourd’hui, les compagnons d’Emmaüs ont vécu, expérimenté, une révélation forte lors de la fraction et du partage du pain effectuée par l’étranger.

Je dis fraction et partage du pain, parce que même si la formule consacrée est “fraction du pain”, l’usage que nous montre l’Evangile et qui s’est perpétué jusqu’à nos jours est bien que le pain est rompu pour être partagé. SI leurs yeux s’ouvrent à ce moment-là, c’est que le message est très clair : ce pain qui est béni de Dieu, ce pain qui est nourriture et qui donne la vie, c’est pour le partager. Cette expérience de ressentir de l’intérieur que la Vie est plus forte que la mort, que mon orientation sexuelle n’est ni une condamnation ni un empêchement à avancer, est une invitation à reprendre la route, à ne pas se replier, à vivre en Ressuscité, en témoin de l’Amour.

En conclusion, que changerait le fait que les compagnons d’Emmaüs soient homosexuels? Sur le contenu de la foi, rien. Mais sur la posture, beaucoup. Ils nous montrent qu’on peut être homosexuel, ne pas être focalisé sur cette spécificité – comme ils ne le sont pas non plus sur le fait qu’ils sont d’Emmaüs, par exemple – et ne pas y trouver raison de ne pas recevoir, accueillir, partager, avancer.

C’est un formidable passage d’Evangile pour fortifier la confiance et l’espérance en notre Ami Jésus. C’est Lui qui vient à eux, qui vient à nous. Nous pouvons hésiter, douter, questionner, ce n’est pas grave, il y trouve encore sa place. La seule chose nécessaire est d’être fidèle à soi-même, aux appels de sa jeunesse, à la promesse de vie qui est est présente en chacun de nous et que les conditions particulière à chacun n’ont pas à empêcher d’advenir.

Au contraire. Dieu aime la diversité. Il me semble qu’une des raisons de notre présence sur terre est que Dieu aime la diversité, aime composer avec la diversité, aime s’expérimenter lui-même dans la diversité, être le lien, la force et l’amour qui rejoint et relie toute cette diversité. Il le fait à travers nous, à travers l’humanité. il expérimente l’Amour (au sens d’une expérience essentielle, pas d’une expérimentation, hein !) par l’humanité. Nous sommes les porteurs et les garants de cette “expérience” de vie. Et nous en sommes possiblement aussi le principal obstacle. Celui que nous nous mettons les uns aux autres, mais aussi celui que nous nous mettons à nous-même en premier quand nous ne croyons pas que Dieu nous aime au point que cette diversité lui plaît, qu’il la veut, la cautionne…l’a créée.

Z – 30 avril 2017

source photo : oeuvre de Yisrael Dror Hemed (2016).