michelgiliberti-le-pardis-terrestre

Tais-toi.
C’est donc ainsi
Que j’ai été accueilli.

Tais-toi.
Ne fais pas de bruit,
Tu déranges !

Tais-toi.
Fais-toi oublier,
Rentre dans les normes.

Tais-toi.
Apprends à t’oublier,
Apprends à faire plaisir.

Surtout,
Ne dérange pas

Peut-on imaginer
Combien ce ressenti intériorisé,
Au point de l’oublier,
Peut marquer
Profondément la vie
D’un petit homme ?

Tais-toi :
Quand je ne sais pas exprimer mes désirs.

Tais-toi :
Quand je n’ai pas de préférence.

Tais-toi :
Quand je ne sais pas choisir un métier.

Tais-toi :
Quand je n’arrive pas à imaginer être aimé.

Tais-toi :
Quand il faut se dévoiler, se mettre en avant,
avec la trouille d’entendre d’autres « tais-toi ».

C’est bon.
Je ne me tairai plus.

J’écouterai
Profondément ce qu’il y a en moi.

Car cela parle en moi,
Cela parle beaucoup !

Tout ce que je suis,
Tout ce que je dois être
Tout ce que j’ai à être.

La partie de moi
Qui veut parler
S’exprimer
Comme on s’engage
Dans le monde.

La partie de moi sacrée
Qu’elle soit divine
Ou innée,

Qui avait reçu si violemment
Ce « tais-toi ! »

Et qui désormais
Veut se déployer.

Je parlerai,
Je vivrai.

Zabulon  – 15/10/2016

Je crois, et je parlerai, moi qui ai beaucoup souffert…” (Psaume 115,10)

Source photo : Michel Giliberti, photographe

 

 

sage-nudien

La vie va te casser. Personne ne peut t’en protéger, et vivre seul n’aidera pas, car la solitude aussi te brisera avec sa nostalgie. Il te faut Aimer. Il te faut ressentir. C’est pour cela que tu es sur terre. Tu es ici pour risquer ton coeur. Tu es ici pour être englouti. Et quand il t’arrivera d’être cassé, ou trahi, ou quitté, ou blessé ou effleuré par la mort, assieds toi sous un pommier et écoute les pommes tomber et s’entasser autour de toi, gaspillant leur douceur.

Dis toi que tu en as goûté autant que tu le pouvais.

 

Louise Erdrich, romancière américaine

 

 

ecoute-les-pommes-tomber

Source photos : Sage-nudien par Julien Wolga et le jardin d’Olivier