Une personne qui ne marche plus au son des tambours de la société et qui danse sur la musique qui jaillit d’elle-même : voilà une excellente définition de l’être éveillé.

Anthony De Mello

 

Anthony De Mello est un prêtre indien, jésuite, né à Bombay en 1931 et décédé à New York en 1987. Psychothérapeute et spécialisé dans l’accompagnement des personnes,il a publié de nombreux ouvrages de spiritualité.

 

Source photo : danseur de rue à Cuba, photographié par Omar Z. Robles

« Jésus a-t-il fondé une religion ou les a-t-il toutes abolies en proclamant qu’il faut détruire les temples parce que le vrai temple de Dieu, c’est l’homme ; qu’il faut abandonner les cultes parce que le vrai service de Dieu, c’est le service de l’homme ; qu’il faut transgresser la loi parce que la seule loi est “Aimez-vous les uns les autres” ? »

Louis Evely, in « Le Chemin de Joie », 1968

Image : “The Rising”, oeuvre de Philip Gladstone

Source texte et photo : via Loquito

Jésus disait à ses disciples : “Que votre cœur ne soit pas bouleversé.” (Jean 14,1)

Ne sois pas bouleversé,
toi qui te découvres différent
et qui prends peur d’être rejeté,

Ne sois pas bouleversé,
toi qui subis l’opprobre, l’humiliation,
de ta famille ou tes amis
à cause de ton orientation sexuelle,

Ne sois pas bouleversé,
toi qui as peur d’être découvert,
toi qui as peur de ne pas être aimé,
toi qui ne te sens pas libre d’être toi-même
à cause des propos homophobes que tu entends,
du dégoût affiché des uns sur les autres,
quand ceux qui rejettent sont les tiens
et que tu as peur d’être rejeté par eux.

Ne sois pas bouleversé,
toi qui es gay, homosexuel, homosensible,
qui te crois pécheur et te culpabilises
à cause de ton orientation sexuelle,
toi à qui on a fait croire que l’Eglise te rejetait,
pire: que le Seigneur te rejetait.

Ne sois pas bouleversé :
Jésus t’aime comme tu es.

Beaucoup ne savent pas,
n’imaginent pas,
sont incapables d’imaginer
que Jésus t’aime comme tu es.

S’ils le connaissaient vraiment,
ils connaîtraient aussi son Père,
et qu’il y a plusieurs demeures
dans la maison du Père.

Ils reconnaîtraient
que Jésus est le chemin, la vérité, la vie,
pour quiconque se met à le suivre,
et qu’il n’exclut personne.

Oui, sois consolé.
Entends ce message du Christ lui-même
qui invite à croire si ce n’est par les paroles,
au moins par les oeuvres.

Et l’oeuvre, tu la connais,
toi qui te sens si seul et, parfois, si désespéré.
Oui, tu la connais,
tu peux la voir si tu arrêtes d’écouter
les mots du vent mauvais qui vient de l’extérieur
et que tu écoutes au fond de toi
cette voix qui te dit que tu es aimé tel que tu es.

Cette condamnation que certains brandissent
ne vient pas de Dieu
puisqu’elle sème la haine et la discorde,
puisqu’elle sépare, oppose et humilie.

Sois consolé,
toi qui es différent
et qui ne peux faire autrement
qu’être ce que tu es.

Tu es aimé du Seigneur.
Il n’y a pas de condamnation qui te concerne.
Le seul commandement est de s’aimer les uns les autres
et d’honorer Dieu tel qu’il t’a fait.

Z – 14 mai 2018

Texte inspiré par l’homélie pas gay du tout d’un prêtre profondément spirituel sur l’Evangile de ce dimanche (Jn, 14,1-12)

Source photo : Oliver Cheshire.

“Si le règne de Dieu continue de faire irruption dans notre monde, on doit le remarquer. Percevoir le royaume de Dieu ne signifie pas connaître le temps ou le lieu de sa venue. La connaissance qui compte ici n’est pas informationnelle (Où? Quand?) ni théorique (Qu’est-ce exactement, le Royaume?). Les préoccupations concernant le moment où se manifestera le règne de Dieu détournent notre attention de la réponse pratique à l’urgente invitation à y entrer.

L’horizon du Royaume de Dieu nous invite à prêter attention d’une nouvelle manière à l’expérience ordinaire. (…) Certes, une interprétation adéquate est nécessaire, mais il faut d’abord que quelque chose se passe dans l’expérience pour qu’on l’interprète. La perception fondée sur cette espérance nous ouvre à ces temps extraordinaires où Dieu prend des initiatives particulières dans la vie des individus et des communautés.”


William C. Spohn
, Jésus et l’éthique.

Le Royaume est déjà là…

Et voilà, ne pas chercher de-ci de-là, ne pas attendre de l’extérieur, ne pas dire “le voici, le voilà” et agir comme ces enfants jamais contents qui disent tantôt oui tantôt non, jouent de la flûte et pleurent à la fois du même objet.

Le Royaume est déjà là, et c’est dans nos vies qu’il se manifeste.

Alors je poursuis ma réflexion sur le possible rapport entre la spiritualité chrétienne et l’homosensibilité. Je me demande en quoi l’expérience de l’homosensibilité apporte quelque chose de nouveau à l’humanité et si je suis bien disposé à laisser cela advenir.

Tant de peurs, tant de résistances, tant de conditionnements à défaire pour pouvoir être soi, pour laisser l’Être advenir et se déployer. Et qu’est-ce que le Royaume de Dieu sinon l’espace et le temps où il peut exercer son Règne, l’espace et le temps où je le laisse être en moi, où je me laisse être et porter par Lui?

Je ne l’ai pas choisi. Je suis loin d’avoir imaginé ce qui arriverait. Longtemps il m’a semblé que c’était une sorte de malentendu. Mais si malentendu il y avait, il n’était qu’avec moi-même. La vérité est que la recherche du Royaume, m’a amené à accepter l’homosensibilité et, ce faisant, a entraîné une révolution intérieure qui n’est pas terminée et qui refonde complètement ma vie spirituelle.

Dans l’expérience d’être gay, si elle est libre et acceptée comme un don de Dieu, il y a tellement à découvrir. J’imagine bien que ces propos ne sont pas acceptables pour tous, beaucoup ne sont ni prêts ni préparés à les recevoir et jugent plus commode de rejeter en bloc ce qu’ils ne savent pas encore imaginer, ce qui leur est étranger et leur apparaît comme inconcevable.

Je ne sais plus qui a dit que ne pas concevoir quelque chose, c’est faire preuve de manque d’imagination. Pour ceux qui n’ont pas cette imagination et qui se défendent en arguant que c’est parce qu’ils ne veulent pas en avoir, cela doit être déjà bien triste.

Peu importe. Le Règne de Dieu est là, le ferons-nous attendre? Il ne nous est pas extérieur, il est en nos vies quand elles chantent la grandeur et la beauté de l’existence sans s’emmêler dans les conformismes ambiants. Le Règne de Dieu, c’est cet élan de liberté et de beauté à la fois qui fait grandir et rend si fort que, même face à la mort, on ne pourrait revenir en arrière.

Non je n’ai pas choisi d’être homosensible. Je l’ai refusé, refoulé, renié autant que j’ai pu et j’ai cru être un bon chrétien en faisant cela. Or, je découvre que c’est dans cette dimension que le Christ m’attendait, qu’il était dans cette part d’humanité et qu’il m’y aimait tendrement alors que moi je ne m’aimais pas. Je me fuyais et le fuyais en même temps.

Y a-t-il une spiritualité gay ?

J’en viens à cette question qui m’habite depuis quelque temps et pour laquelle je n’ai pas encore de réponse : y’a-t-il une spiritualité gay ?

On peut penser que non car le Christ est le même pour tous et englobe toute l’humanité, on peut le penser d’autant plus que la tendance naturelle des homosexuels croyants semble être d’insister sur le fait que rien ne les distingue des autres humains. Mais en même temps, en découvrant et en acceptant mon homosexualité, sans rougir et sans honte, en tant que chrétien, je découvre une profondeur et une richesse dans ma vie dont je m’étais privé. Des portes s’ouvrent sur le sens de mon existence, le sens de l’amitié du Christ pour moi et pour tout homme, sur la manière dont Dieu me parle et m’aime. Il semble qu’il y ait des thématiques qui me touchent davantage ou autrement qu’en me pensant hétéro, et elles me touchent parce qu’elles fondent, parce qu’elles m’ouvrent à un espace intérieur insoupçonné jusque là. Parmi ces thématiques, celle du Retour à soi et à l’Être, celle de l’amitié et de l’Ami Idéal, celle de la communion des coeurs, celle de la beauté ressentie qu’elle soit humaine, esthétique ou artistique, etc.

Si le Royaume est déjà là au coeur de nos expériences, pour moi il prend la forme de l’acceptation de l’homosensibilité et de l’ajustement de ma vie intérieure à cette réalité. Je repose alors ma question : y a-t-il une spiritualité spécifique aux gays ? Y a-t-il une manière spécifique d’être en relation avec le Créateur par le fait d’être gay ? Un chemin intérieur, et spirituel, spécifiques? Si oui, est-il déjà formalisé quelque part? Faut-il approfondir cette voie?

J’aime poser des questions. 🙂

Z – 24/01/2017

Source photos : el beso et los manos sur cristianosgay.com

Je ne sais pas où je vais, oh ça je l’ai jamais bien su
Mais si jamais je le savais, je crois bien que je n’irais plus

Aujourd’hui je t’aime, oui mais demain, on ne peut jamais être sûr de rien
On va toujours seul sur la route, je continue coûte que coûte

Et puis une route en croise une autre et puis une autre et encore une autre
Pourvu que la tienne, oh mon amour, croise la mienne tous les jours

Je ne sais pas où je vais, oh ça je l’ai jamais bien su
Mais si jamais je le savais, je crois bien que je n’irais plus

Je ne sais pas où je vais, oh ça je l’ai jamais bien su
Mais si jamais je le savais, je crois bien que je n’irais plus

Et oui je suis une cigale, t’inquiète fourmi j’crêve pas la dalle
La musique c’est un bon gagne-pain, où que je sois, je ne manque de rien

Je chante toujours de quoi grailler, de quoi trinquer, de quoi causer
Je m’endors où il fait sommeil et je passe l’été au soleil

Je ne sais pas où je vais, oh ça je l’ai jamais bien su
Mais si jamais je le savais, je crois bien que je n’irais plus

Un jour ici, l’autre là-bas, la SNCF ne m’aura pas
Et toi qui n’as qu’une seule adresse, ô pauvre, si tu veux, j’ten laisse

Mais échange de bons procédés, si tu veux bien m’héberger
Ben je serai le bienvenu, ben nous serons les bienvenus

Je ne sais pas où je vais, oh ça je l’ai jamais bien su
Mais si jamais je le savais, je crois bien que je n’irais plus

 

Paroles et musique : La rue Kétanou

Source photo : Photo de Devin Mitchell, Photographe