Pentecote

 

J’avais l’intention de parler de la Pentecôte, du don de l’Esprit, honorer cette belle fête chrétienne. Mais je ne le peux pas… Pas à la manière dont je l’envisageais et peut-être ne le pourrai-je jamais plus. Trop de choses se bousculent en moi en ce moment.

Je voulais parler du corps et de l’esprit, ce pauvre amas d’os et de chair, promis à la mort tandis que l’Esprit nous anime et nous conduit à la vie éternelle. Je ne peux pas.

Ce n’est pas que j’ai perdu la foi, oh non ! Ce n’est même pas que mon discours était faux. Mais face au surgissement de l’être, quel discours puis-je tenir?

Ma Pentecôte, je vais vous la raconter, puisqu’elle est en train d’advenir dans ma vie. Que puis-je faire d’autre? Elle est là qui surgit tout à coup et elle ne ressemble à rien de ce qui était prévu. Pourtant je la reconnais bien. Car elle est une force de vie gigantesque qui est en train de jaillir, me bouleverse, me réconforte, me console, me fortifie à la fois. Elle est Paix, Amour, Joie, et plein d’autres choses en même temps et tout ça confondu.

Débordement d’amour.
Jaillissement de vie.
Torrents de compassion.
Je suis submergé,
et c’est bon.

Ah ça prend une drôle de tournure : au départ c’est comme si j’étais submergé par mes propres émotions. Et me voilà à dire ou à penser que je suis bien trop sensible, que ça ne se fait pas d’écouter ses émotions à ce point là et les laisser prendre le pouvoir, mais, mais… ai-je seulement eu le temps de vraiment le penser? Elles sont déjà là, elles m’entraînent avec elles. Je suis comme porté par une vague qui m’enveloppe et me protège, et me berce, et accueille mes larmes si longtemps contenues. Ces émotions n’étaient qu’une goutte d’eau à la surface de la vague qui m’entraîne

Une digue vient de se rompre.
Un mur, des murs, des verrous, que sais-je? qui sautent.
Ca ne fait même pas mal. C’est doux, c’est bon, c’est infini.

Où est-ce ? Je ne sais pas.
Ca surgit d’un fond de moi que je ne sais pas situer physiquement,
mais ça remplit aussi l’espace et le temps,
et me relie à d’autres qui le reçoivent aussi.

C’est immense.
Immensément bon.
Ma raison me dit de faire attention,
que peut-être ça va m’entraîner n’importe où,
ou que, peut-être, ça va s’arrêter et que je me retrouverai perdu et désemparé.
– Mais tais-toi donc ma tête, je ne t’écoute plus !

Il y a ce surgissement primal qui m’emplit et qui est si bon.
Tu comprends, c’est la vie, c’est la Vie qui revient,
la folie, la joie, la fête et la danse !

Mais d’où ça vient ? Je ne sais pas. C’est partout.
Ca vient de moi mais c’est aussi le coeur de mes amis,
mes bien nouveaux amis, c’est vrai.
Ils m’ont touché le coeur, ils ont touché mon être.
Il semble que mon être
attendait un mot, un geste, de vrai amour
pour se réveiller, se libérer, grandir,
venir habiter chez lui.

Et voilà, c’est le moment.

Le plus incroyable, et c’est cela ma Pentecôte,
c’est que nous parlions le même langage,
celui de l’Être.
Tu as vu? Je ne dis même plus celui du coeur.

Ils sont gays ou pas,
ils sont de France, de Suisse, d’Italie, du Canada …
Ils sont ma famille,
Ils m’accueillent comme tels.

Et tous ces débordements
qui m’affolent un peu, je dois bien le reconnaître,
ils les regardent avec gentillesse.
C’est naturel pour eux.

C’est le plus étonnant, d’ailleurs.
Le naturel avec lequel ils reçoivent
ce que nous appelons sensibilité
et qui est en fait l’accueil tranquille
de la puissance de Vie
déposée en chacun de nous.

Mon coeur est touché,
mon être se réveille.
Je baisse les bras, je laisse les armes.
Je ne veux que ça.
Toute ma vie, j’ai attendu ça, je crois.

Où cela m’entraîne-t-il,
De quoi demain sera-t-il fait ?
Je ne sais pas.
Je ne veux pas savoir.

Pour l’instant, je veux juste continuer
à sentir le Vent gonfler mes voiles,
ouvrir toutes les portes et les fenêtres de ma maison intérieure
et rejoindre le vent des amis
qui ont déjà le coeur ouvert
et m’invitent dans leur danse
déjà commencée.

C’est la fête de la Vie.

Bienheureux amis !

Z  – 14 mai 2016

Quand arriva le jour de la Pentecôte,
au terme des cinquante jours après Pâques,
ils se trouvaient réunis tous ensemble.

Soudain un bruit survint du ciel
comme un violent coup de vent :
la maison où ils étaient assis
en fut remplie tout entière.

Alors leur apparurent des langues
qu’on aurait dites de feu,
qui se partageaient,
et il s’en posa une sur chacun d’eux.

Tous furent remplis d’Esprit Saint :
ils se mirent à parler en d’autres langues,
et chacun s’exprimait selon le don de l’Esprit.

(Actes des Apôtres, 2, 1-4)

LloydKnightAndAbdielCedricJacobsen

. . . nous nous rendons compte que nous n’avons pas à rester
sur le petit terrain  de notre souffrance,
et que nous pouvons aller au-delà.

Nous arrêtons de centrer notre vie sur nous-mêmes.
Nous en attirons d’autres avec nous
et nous les invitons dans une danse plus grande.
Nous apprenons à faire de la place pour les autres
– Et pour l’Autre si bon en notre centre.

Et quand nous devenons présents
à Dieu et au peuple de Dieu,
nous trouvons notre vie plus riche.
Nous réalisons que le monde entier
est notre piste de danse.
Nos pas se font plus légers
parce que Dieu a appelé les autres
à danser aussi.

(…)
La prière nous met en contact
avec le Dieu de la Danse.

 

Henri Nouwen
Extrait de Turn my mourning into dancing

(Thomas Nelson Publishing Company, 2004).

Source : thewildreed.blogspot.fr

A mon ami extraordinaire,
et ses amis tout autant extraordinaires !

danse

le-vent

Le vent souffle où il veut
Et toi tu entends sa voix,
Mais tu ne sais pas d’où il vient,
Et tu ne sais pas où il va,
Le vent.

Amis, il m’arrive des choses étonnantes en ce moment, très très fortes émotionnellement. Très, très bonnes aussi.
De mon coeur jaillit un cri dont je me fiche éperdument de savoir s’il est stupide ou pas, il doit sortir :

Le vent… Seulement le laisser aller.  En ce moment il m’emmène vers de tellement beaux rivages ! Que ce vent m’emporte, m’emporte, je ne veux plus jamais le quitter!

Pour aider à entrer dans cette belle réalité spirituelle, voyez cette belle version mise en images avec la mer, les vagues, la plage, les bateaux, le vent…

LE VENT
(Michel Scouarnec /Jo Akepsimas)

Le vent souffle où il veut
Et toi tu entends sa voix,
Mais tu ne sais pas d’où il vient,
Et tu ne sais pas où il va,
Le vent.

As-tu compté les grains de sable
sur les bords de la mer ?
As-tu compris les chants des vagues,
aux pays des matins clairs ?

Quand tu regardes les étoiles
au manteau de la nuit,
Tu voudrais bien lever le voile
qui te masque l’infini.

Comme l’oiseau, loin de la terre
tu voudrais t’envoler,
Vers le soleil, vers la lumière
dans un ciel de liberté.

un ami extraordinaire

J’ai un ami extraordinaire
et son nom est… Non, ça, c’est notre secret.

J’ai un ami extraordinaire,
il se reconnaîtra ou pas, en lisant ces lignes.

J’ai un ami extraordinaire,
car notre relation est virtuelle.

Ah, ça ! ça doit faire sourire,
Que peut-il bien venir de bon du virtuel?

Eh bien, c’est oublier que le coeur des hommes,
lui, n’est pas virtuel.

Derrière chaque ami virtuel, il y a un homme, un coeur, une vie.

Certes, le plus souvent cela est complètement superficiel.
Mais, il n’empêche, j’affirme haut et fort
que j’ai un ami extraordinaire;

Notre relation n’est que virtuelle,
mais il a une sensibilité qui m’a touché,
et il en est de même pour lui.

Cela pose plein de questions,
sur la définition de l’amitié,
la possibilité de confusions,
illusions ou manipulations.

Mais cela demeure:
J’ai un ami extraordinaire.

Nous ne nous parlons pas souvent,
et c’est toujours en mots mesurés.
A vrai dire, il n’aime pas beaucoup se disperser en parlottes
comme je le ferais facilement.
Mais chaque mot, chaque intervention, est posée, sentie, ajustée.
Chaque échange nous révèle,
nous fait naître et grandir.

Pourquoi dis-je que c’est un ami?

Parce que sa sensibilité répond à la mienne,
sans nous connaître, nous sentons les mêmes choses
et nous complétons aisément.
Pas de longs discours, pas de longues démonstrations.
Nous nous comprenons,
nous nous apprécions,
nous nous savons présents l’un à l’autre
sans qu’il y ait besoin d’en rajouter.

Il est attentif à ce que j’écris,
je suis attentif à ce qu’il écrit.
Le petit mot doux, gentil et qui fait avancer.
Toujours juste.
Il dit la même chose de moi, me semble-t-il.

C’est un ami extraordinaire.

Peut-être ne nous rencontrerons nous jamais,
peut-être que si.
Ca ne semble pas avoir une grande importance.

Mais si nous nous rencontrons un jour,
j’aimerais qu’il n’y ait pas beaucoup de mots.
J’aimerais que nous plongions nos regards l’un dans l’autre,
doucement, tranquillement, sans peur ni honte,
nous qui n’avons rien à nous cacher
et pas besoin de mots pour le dire.

Peut-être se tenir les yeux fermés,
mains dans les mains,
pour ne rien gâcher de cette rencontre.

Ou peut-être pas.
Il est possible que cet ami
soit gêné dans l’expression de ses sentiments.

Et goûter, goûter seulement,
la Présence.

Ce sera comme nos échanges virtuels,
ce sera comme notre amitié présente,
en plus grand peut-être
et en tout autant éphémère
puisqu’il faudra bien se séparer et se quitter.

Ce sera peut-être très court, et même très furtif,
car nous sommes différents.
Moi porté sur l’intensité relationnelle du moment,
Lui sur la relation ouverte et partagée à tous.

Mais cette présence,
ce coeur à coeur,
cette douceur partagée,
c’est cela qui est l’ordinaire de l’amitié vraie.

Si rare n’est-ce pas
que je dois bien le confesser :

J’ai un ami extraordinaire !

Zabulon – 7 mai 2016

Guerre 1939-1945. Affiche à la mémoire des otages fusillés à Châteaubriant (Loire-Atlantique). Dessin de Simo. Le 22 octobre 1941.

Guerre 1939-1945. Affiche à la mémoire des otages fusillés à Châteaubriant (Loire-Atlantique). Dessin de Simo. Le 22 octobre 1941.

Les fusillés de Châteaubriant

Ils sont appuyés contre le ciel
Ils sont une trentaine appuyés contre le ciel,
Avec toute la vie derrière eux
Ils sont pleins d’étonnement pour leur épaule
Qui est un monument d’amour

Ils n’ont pas de recommandation à se faire
Parce qu’ils ne se quitteront jamais plus
L’un d’eux pense à un petit village
Où il allait à l’école
Un autre est assis à sa table
Et ses amis tiennent ses mains
Ils ne sont déjà plus du pays dont ils rêvent
Ils sont bien au dessus de ces hommes
Qui les regardent mourir
Il y a entre eux la différence du martyre
Parce que le vent est passé là où ils chantent
Et leur seul regret est que ceux
Qui vont les tuer n’entendent pas
Le bruit énorme des paroles
Ils sont exacts au rendez-vous
Ils sont même en avance sur les autres
Pourtant ils disent qu’ils ne sont plus des apôtres
Et que tout est simple
Et que la mort surtout est une chose simple
Puisque toute liberté se survit.

René-Guy Cadou 
Pleine Poitrine (1946)

 

Quand il écrit ce texte, en 1941, René-Guy Cadou est encore un jeune homme. Un jeune homme sensible, apprenti poète. Un jeune homme gauche et maladroit. Mais il a un coeur et une capacité assez incroyable à ressentir et percevoir de l’intérieur des choses cachées. Cela donnera une poésie inclassable, dans laquelle on rentre ou pas.

Par bonheur, j’y suis entré un jour et ne l’ai plus jamais quitté.  Dans ce poème, il parle des fusillés de Châteaubriant, une trentaine de jeunes gens  pris en otage et fusillés en représailles de l’assassinat d’un officier allemand par la Résistance.

Ce poème a une histoire : celle de l’impuissance de René-Cadou, jeune homme, qui croisera un fourgon qui emmène les otages au supplice. Impuissance sublimée. Le poète écoute et entend, au delà l’apparence, le sens de ce qui se passe vraiment.

Cette impuissance, c’est la mienne. Un peu toi, un peu moi, un peu nous. Alors que fais-je de ma capacité à me relier, à puiser le sens et le ramener pour tous?

Ils sont exacts au rendez-vous
Ils sont même en avance sur les autres

« Pourtant ils disent qu’ils ne sont pas des apôtres
Et que tout est simple 
»

« Et leur seul regret est que ceux
Qui vont les tuer n’entendent pas
Le bruit énorme de leurs paroles 
»

Aujourd’hui 8 mai, mémoire de la victoire de 1945, souvenons-nous de la résistance à la haine sous toute ses formes: racisme, homophobie, exclusion sociale. Ce rejet de l’autre, de la différence apparente, qui n’est qu’un non-sens puisque quand j’élimine l’autre, c’est une partie de moi que je refuse.

Je salue particulièrement mes amis de confession juive, mes amis homosexuels, mes amis de toute classe sociale, tous ceux qui ne sont pas dans le camp des vainqueurs mais qui ont un coeur qui sait s’indigner.