Scène ordinaire d’un garçon ordinaire
Je le fis tourner,
et je m’éloignais ,
et
je lâchais sa main.
Comme s’il s’agissait d’un
« Au revoir. »,
comme si on venait de me briser le cœur.
Il avait besoin d’espace.
J’avais besoin d’espace …
Il fit donc un pas en arrière.
Moi aussi ….
Mon regard heurta le sol.
Il semblait réfléchir,
mais il ne se dégageait de lui qu’un soupir intérieur.
Il revint vers moi,
et reprit mes mains,
et me regarda dans les yeux.
Puis il gémit plutôt que dit
ces deux mots comme on demande une faveur,
comme s’il était au bout,
qu’il n’en pouvait plus,
qu’il fallait que ça sorte,
qu’il fallait que sa demande se réalise,
pour le maintenir en vie.
Dans un nouveau soupir de désespoir,
il me souffla :
« Embrasse-moi. »

®Ash

– – – –
Ash, toujours.
Poète incomparable.
Ces mots
qui sortent des tripes,
des tréfonds
de la douleur
et du désir de vivre.
Comme un cri.
Une exigence.
Et une invitation.
La vie qui crie
qu’elle veut vivre.
Parfois,
je me surprends
dans telle ou telle situation,
à me demander
ce que Ash
aurait saisi du moment
et comment
il l’aurait transformé
en un instant
essentiel.

Tu me manques, poète.
Tu me manques.

Z – 7/2/2025

Sources :
texte : blog tumblr de Ash, 30 déc 2015
photo : Répétitions pour le “Oscar Wilde Ballet” créé par Christopher Weldon avec the Australian Ballet (2024)

Et si l’amour est un miroir
Je suis loin
D’être prêt
à y faire face

… …
… …

J’attends
celui ou celle
avec qui ce serait évident
et…
facile.

Ces mots sont empruntés à Lance Priester. Il faut les accueillir avec l’authenticité avec lesquels il les prononce, dans cette magnifique chanson : “Je m’imagine”. Au début de la chanson, quelques imperfections de texte ou en tout cas un tâtonnement entre le texte et la mélodie peuvent dérouter mais au fond, à écouter et réécouter cette chanson, ils lui donnent aussi son charme en faisant ressortir la fragilité, la vulnérabilité du personnage incarné dans cette chanson. Puis la voix prend son envol et Lance va chercher au fond de lui les émotions qu’il exprime avec intensité au service de ce beau message. Le plus de Lance, c’est cette capacité qu’il a d’habiter un mot qui pourrait être banal si on ne faisait que le lire et à le rendre vivant.

Si vous passez par là et que vous venez à lire cette page, s’il vous plaît écoutez cette interprétation jusqu’à bout, la dernière syllabe, la dernière note. Peut-être aurez-vous envie de pleurer, ou de rester en silence, ou de revenir à cette chanson et déjà vous l’écouterez différemment car elle vous habitera et tracera un chemin depuis vos entrailles qui s’ouvre sur autre chose que les mots prononcés.

Pour découvrir la chanson en entier c’est soit sur spotify soit sur youtube :

Source photo : photo proposée par Edgar Pereira sur Unsplash.

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Les commentaires reçus à propos de ma dernière publication me rendent perplexe. Je comprends les encouragements à me dévoiler et à m’assumer. Oui, je comprends vraiment. Mais ce n’est pas si simple.

Comment expliquer cela ? Je ne cherche pas à être reconnu comme gay ; je le suis, c’est entendu, mais je ne suis pas que ça. Est-ce que m’afficher officiellement comme homosexuel résoudrait comme par magie mon mal être et me permettrait d’être heureux ? C’est, hélas, bien plus compliqué que cela. Avoir eu du mal à accepter et à assumer mon homosexualité n’est qu’un élément parmi d’autres de ma complexe personnalité.

C’est de m’accepter et de m’assumer tout court dont j’aurais besoin, l’homosexualité n’étant qu’une des facettes de ce dilemme terrible. Une illustration, un bon exemple. Pas le problème de fond.

Ce n’est pas que sur l’orientation sexuelle que je me cache, c’est dans tellement d’autres domaines ! Bien sûr, ça ne se voit pas. Je (me) suis autoconditionné à donner le change, à me le donner à moi-même. Je peux briller dans tel ou tel domaine, je peux m’investir à un point que l’on me trouve doué ou talentueux, je me peux me disperser dans de multiples directions, je peux même aider les autres, les soutenir, leur permettre de faire un pas de plus au service de leur développement et de leur épanouissement, et tout cela me réjouit bien entendu mais ne me comble pas. Ce ne sont que des fuites. Tout, n’importe quoi, si possible assez brillant pour m’apporter de la reconnaissance ou de l’auto-reconnaissance, plutôt que sentir à nouveau cette connexion vertigineuse à la possibilité du vide, du néant, qui entraînerait vers rien.

Ek-sister, sortir de moi. Vite, produire quelque chose à quoi se cramponner du moment que cela me sort de ce gouffre qui semble vouloir m’aspirer.

Cette expérience vécue bien longtemps avant que je ne sois éveillé à la sexualité et à une préférence affective ou sexuelle est première (j’y fait allusion dans un écrit lointain me semble-t-il, j’avais 6ans et demi). L’homosexualité n’est qu’un danger supplémentaire d’être jugé, rejeté, abandonné. Elle a été une méga question dans ma vie, elle l’était au moment où j’ai créé ce blog, elle ne l’est plus.

La seule question qui m’occupe est que je n’arrive pas à m’aimer moi-même. Et quand bien même un homme viendrait m’aimer, je ne saurais probablement pas dire si je me laisserais aimer par besoin de l’être et sans aimer à mon tour ou si je fuirais, autoconvaincu que c’est n’importe quoi, que l’échange réciproque parfait n’existe pas.

C’est terrible, cela se fait malgré moi. Il y a quelque chose d’archaïque en moi – une part de moi – qui veut sans cesse me protéger de la prochaine fois où l’on pourrait me faire sentir que je ne suis rien, que je n’ai rien à faire ici, que je pourrais disparaître alors que – réflexe salutaire de survie, mais à quel prix ! – je ne veux pas me laisser aspirer par ce néant. Je vous passe les détails mais cela se traduit globalement par l’accumulation de protections instinctives « au cas où » : prendre du poids au cas où l’on viendrait à manquer, tout savoir d’un sujet au cas où je serais pris en défaut de savoir, savoir faire moi-même au cas où les collaborations seraient défaillantes. Etc. Etc.

Dans le magma de mon existence, la question homosexuelle n’est finalement qu’une question parmi d’autres. Je ne suis pas homosexuel. Je suis un être humain, qui se trouve attiré affectivement par les hommes, qui a peur d’être parce qu’un jour – trop tôt, bien trop tôt ! – on lui a fait sentir qu’il pourrait ne pas être.

J’afficherai qui je suis quand je serais capable d’afficher tout qui je suis. C’est la seule chose qui vaille désormais. Le pire, c’est que je n’ai rien de honteux à cacher. Juste, j’ai peur d’exister. Peur du conflit, du rejet et de tout ce qui pourrait y ressembler ou y conduire. L’art de se paralyser soi-même.

Aussi, je remercie ceux qui m’encouragent au dévoilement et qui, probablement, pour ce qui les concerne tirent avantage de pouvoir vivre librement leur homosexualité. Mais comment fait-on pour rassurer et apprivoiser un être tapi au fond de sa tanière et qui a peur de sortir ? L’injonction ou l’appel de l’extérieur : « bon allez, viens, quoi ! sors de là » ne servent à rien. Soit il faut que je trouve la force intérieure de me lever et de sortir – j’y travaille ! – soit quelqu’un de bienveillant et attentionné – c’est une illusion, un rêve, probablement – saura me rejoindre, me prendre dans ses bras et me ramener avec lui.

Je comprends que cela puisse être désespérant pour ceux qui ont déjà fait ce chemin ou qui sont doués de pouvoir faire ces aller-retours facilement. Ce n’est pas mon cas. Merci en tout cas de me permettre d’approfondir ainsi cette question. Cela n’est certainement pas inutile.

Z- 26/01/2025

Photo : Franck sur un un-homme-nu.com

Probablement quelque chose de gay…

Je suis tombé l’autre jour sur ce blog tumblr Probably something gay. Peu importe son contenu, c’est sa désignation qui m’a interpellé. Probablement quelque chose de gay… Ca m’a semblé familier comme interrogation ou découverte.

A quel moment me suis-je ouvert au constat que ce que je vivais était “probablement quelque chose de gay” ?

En fait, il y a tellement d’éléments qui aujourd’hui font sens et que je n’osais pas m’avouer dans mon enfance et mon adolescence.

La fascination pour les pages de sous-vêtements masculins des catalogues La Redoute ou 3 Suisses davantage que pour les pages féminines, et même davantage que pour les pages de jouets ou de jeux de mon âge que j’étais sensé consulter pour établir une liste de cadeaux de Noël ? La fascination pour le sexe de ce garçon, en classe de 5eme, qui se déshabillait sans honte devant tout le monde dans le vestiaire collectif de la piscine (alors que je me cachais derrière ma serviette honteux du petit sexe de garçon prépubère que j’étais) ? Les jeux de mains entre garçons qui s’étreignaient alternativement le contenu du slip de l’autre en criant un faux “au viol, au viol!”, ce qui faisait rire tout le monde et qui un jour – honte jamais assumée – m’avait conduit à une éjaculation, que mon “partenaire” avait constaté à travers mon sous-vêtement humide sans que jamais nous osions réaborder le sujet ? Mon attirance et mon rejet des années plus tard pour le livre de Marc Oraison, La question homosexuelle, découvert par hasard dans une librairie, qui me semblait à la fois si libérateur (quelqu’un semblait me comprendre) et si dégoûtant avec son odeur de latrines ? Ma sensibilité, mon affectivité, qui me faisait avoir de grandes amitiés masculines – très chastes – et aucune attirance féminine ? Etc. etc. etc.

Probablement quelque chose de gay. Que je n’ose pas me dire, que je n’ose pas m’avouer, qui semble dangereux bien que je ne sache pas exactement ni pourquoi ni comment. Franchement, je ne suis pas persuadé que ma famille m’aurait rejeté si j’avais eu l’honnêteté de reconnaître que j’étais attiré par les garçons. Mais c’est ce dont j’ai été convaincu. A un point tel que ce n’était pas possible de franchir cette frontière. je ne pouvais qu’être hétéro. Être homo, c’était trop compliqué, trop aventureux, trop dangereux.

Et personne à ce moment-là pour éclaire ma route, pour me rassurer, pour m’accompagner, pour simplement me dire que peu importe qui j’étais, que tout est possible, acceptable et normal.

Probablement quelque chose de gay. Dans le regard, dans le coeur, l’affectivité. Dans la perception des êtres et des choses. Dans la sensibilité. Et vivre avec ce secret pas encore éclos à la conscience d’être attiré et rassuré davantage par les garçons que par les filles sans savoir l’assumer, l’expliquer ou le montrer.

Jusqu’au jour où ce qui est hypothèse, interrogation, devient une certitude. Ce que je ressens, ce que je vis, c’est… probablement quelque chose de gay.

Z – 18/01/2025