Et pour l’année nouvelle, que voudrais-tu ?

Je voudrais quelque chose de beau, mais tu vois, pas quelque chose qui vienne de l’extérieur, de ces beautés qui te séduisent un moment, semblent te remplir et puis s’en vont parce qu’elles ne sont pas de toi.

Non, je voudrais vivre une vraie beauté. Tout à la fois, la sentir, la donner, la partager, être tellement bien en elle que la question de la perdre ou la trouver ne se pose pas, être comme chez soi en permanence et être bien.

Et où est donc cette beauté alors ?

Je crois qu’elle est en moi, qu’elle est en toi, qu’elle est en chacun. L’erreur commune est de la chercher à l’extérieur de nous , comme s’il nous manquait  quelque chose,  alors qu’elle est déjà là en nous et ne demande qu’à s’épanouir et se propager.

Se propager…

Oui. Tu sais, comme il est dit dans le Livre de l’Apocalypse : « Voici que je fais toutes choses nouvelles » (Ap 21, 5). J’ai souvent pensé à cette phrase…  S’il peut faire toutes choses nouvelles dans le d’ancien, c’est qu’il puise en lui-même, à la source de la vie et de la beauté.  On croit souvent, à tort, que l’Apocalyse est un livre qui annonce des horreurs alors qu’il ne fait que dire la réalité du monde d’aujourd’hui. Un monde de souffrances, de compromissions, de corruptions, qui ne rend pas heureux. Et face à cet inachèvement, il y a Lui, qui fait toutes choses nouvelles. Lui venu dans notre humanité. Donc moi aujourd’hui.

La beauté sauvera le monde ? (cf. Dostoïevski)

Pourquoi parler au futur ? La beauté sauve déjà le monde. Regarde en toi, au-delà de la surface, de l’apparence, de la convenance, et tu sauras.

Zabulon, 1er janvier 2019

Source photo : © Thomas Knights

Du haut de ton improbable suffisance,
tu sembles contempler le monde comme s’il t’appartenait.
Tu offres à la vue du quidam ton incandescente beauté,
prémice de désirs ennivrants.
Ta juvénile insouciance n’a cure des contraintes du corps.
Tout t’est dû, tout t’est donné.
Tu contemples les oiseaux du ciel qui n’engrangent ni ne gaspillent.
Tu n’as pour vêtement qu’une écharpe de lin blanc,
tel un lys des champs vêtu par l’artiste des temps.
Tes yeux balaient l’horizon,
royaume sans frontière dont tu es prince,
Fils de Roi.

At N’go, juin 2018

source photo : “Corps masculin nu”, une oeuvre de Georgi Mladenov – Gio Art

Source texte : page facebook de At N’go








La question m’a été parfois posée : pourquoi la nudité dans ce blog?

A vrai dire, je ne vois pas d’autre réponse que parce qu’elle a un effet libératoire. Mais pas forcément érotique. Libératoire, parce que la beauté est libératoire. Parce que la vérité, aussi, est libératoire. Peut-être après des années de déni ou de secret, la vérité de l’attirance pour la beauté d’un corps nu est-elle nécessaire? Des années de conditionnement, aussi, enraciné dans l’éducation reçue à la prime enfance, selon quoi la nudité, le sexe – mais aussi par analogie, la vérité de l’être – doivent être cachés et ne doivent pas se montrer. Parfois pas même se dire.

Au départ, cette nudité que je trouvais sur certains sites me gênait. Plus exactement, je devrais dire qu’elle me troublait, voire qu’elle m’excitait. Je m’en étais étais ouvert au mentor de ce blog, Loquito, qui m’avait répondu, en substance, qu’il y était tellement habitué qu’il ne voyait pas en quoi cela était gênant et que lui, en tout cas, n’y voyait aucune provocation. Nous touchions peut-être là les limites de la pudeur qui sont différentes pour chacun. Mais pas seulement.

Car, pour être vrai avec moi-même, j’ai du admettre que cette beauté qui m’attirait était masculine, et qu’il n’était pas forcément anormal qu’elle m’attire. Cela a été un facteur important d’acceptation de mon homosexualité.

Reconnaître que la beauté qui m’attirait était masculine, et l’assumer tranquillement. Voilà en quoi nudité, beauté et vérité sont liées.

Celant étant, cette question récurrente m’a amené à pousser plus loin ma réflexion sur ce sujet.

Il m’est apparu que la beauté que je considère, la beauté qui m’attire, spécialement quand il s’agit de jeunes hommes à l’esthétique impeccable, me renvoient encore à autre chose : la recherche d’une sorte d’idéal que je vais contempler à l’extérieur de moi. Or, si je recherche cet idéal, fait de beauté, d’idéal et de perfection, c’est que je pense ne pas le trouver en moi. Et c’est alors une quête sans fin de chercher la beauté idéale qu’on voudrait avoir pour soi (et non pas encore, en soi). Se pourrait-il que je la cherche sans cesse à l’extérieur de moi faute de croire assez que tout mon être la porte déjà ?

Puisque je la cherche et semble savoir la reconnaître en autrui, ne fût-ce que par une photo, c’est donc bien que je la connais déjà et que je la possède quelque part. Un peu comme l’artiste qui sort un chef d’oeuvre depuis son imagination et le savoir-faire propre à son art.

Donc cette beauté que je cherche et crois percevoir ici ou là n’est qu’une projection de ma beauté intérieure que je n’ai pas encore rencontrée et assumée.

Et si la beauté des éphèbes, des androgynes, ou des hommes athlétiques semble si importante dans le monde gay, c’est probablement, aussi, en rapport avec l’image de soi.

Tel cherche peut-être à se connecter avec l’idéal de sa jeunesse, au moment où tout semblait possible et où pourtant l’acceptation ou le déploiement de son homosexualité n’était pas possible ; tel autre cherche peut-être ce moment confortable de l’indifférenciation où il lui a semblé qu’avant le grand orage, tout était plus facile ; tel autre encore aimerait être l’homme parfait tel qu’on lui a fait imaginer qu’il devait être dans son rôle masculin.

Mon hypothèse est que nous recherchons à l’extérieur ce que nous avons en nous. Mais nous l’avons au delà de l’apparence, et nous avons du mal à comprendre ce hiatus entre ce que nous sommes et ce que nous voudrions être. En fait, pour comprendre ce dilemne, il faudrait juste considérer que nous ne voulons pas avoir ce que nous avons déjà, mais ce que nous sommes.

Encore et toujours l’être et l’avoir. Nous sommes et cela devrait nous suffire. Et pourtant nous cherchons à avoir quelque reflet de ce que nous sommes comme si nous avions peur que cela nous échappe, ou de ne pas l’être complètement, ou de ne pouvoir l’être que si on le possède aussi à l’extérieur de soi. Balivernes !

Alors, si j’en reviens à mes considération sur la beauté et la nudité, je confirme qu’en soi, cette dernière ne peut pas être impudique ou gênante. Elle l’est seulement dans le regard de celui qui regarde, si lui-même n’est pas au clair avec cela. Evidemment, je ne parle pas ici des poses explicitement pornographiques, mais de la beauté ordinaire d’un corps nu. Ce qui n’empêchera pas ceux qui apprécient cette beauté-là, de se demander sans cesse à quoi elle renvoie dans leur être, leur vie, leur intérieur. Telle beauté que je contemple en l’autre dit quoi de moi?

Enfin, je voudrais partager un extrait des pensées de Pascal qui éclairera un dernier point : celui de l’illusion possible de l’amour. Quand je crois aimer la beauté ou tel attribut, telle qualité, de l’autre, qu’est-ce que j’aime en fait ? Il est si facile de confondre l’autre avec ce qu’il montre, d’aimer ce qu’il montre et ne pas l’aimer lui réellement. En mode inverse (cf. la dyslexie spirituelle), c’est exactement ce qui se passe pour moi -même : parce que je ne m’aime pas assez, parce que je ne connais pas ma beauté intérieure, je vais en chercher un attribut sur un autre et croire l’aimer pour cela, dans une relation vaine et éphémère, au détriment d’une relation coeur à coeur, en vérité.

C’est archi-usé mais c’est toujours vrai, le renard du Petit Prince a définitivement raison : “On ne voit bien qu’avec le coeur, l’essentiel est invisible pour les yeux.”

Un homme qui se met à la fenêtre pour voir les passants ; si je passe par là, puis-je dire qu’il s’est mis là pour me voir ? Non ; car il ne pense pas à moi en particulier ; mais celui qui aime quelqu’un à cause de sa beauté, l’aime-t-il ? Non : car la petite vérole, qui tuera la beauté sans tuer la personne, fera qu’il ne l’aimera plus.

Et si on m’aime pour mon jugement, pour ma mémoire, m’aime-t-on, moi ? Non, car je puis perdre ces qualités sans me perdre moi-même. Où est donc ce moi, s’il n’est ni dans le corps, ni dans l’âme ? et comment aimer le corps ou l’âme, sinon pour ces qualités, qui ne sont point ce qui fait le moi, puisqu’elles sont périssables ? Car aimerait-on la substance de l’âme d’une personne, abstraitement, et quelques qualités qui y fussent ? Cela ne se peut, et serait injuste. On n’aime donc jamais personne, mais seulement des qualités.

Pascal, Pensées diverses III – Fragment n° 41

Source photo : hotzila.tumblr.com








 

Dans la série des plus belles chansons que l’humanité ait produites…

Quand l’amour est décrit de telle manière qu’il se donne presque à voir à comprendre, à saisir. Mais c’est juste pour nous inviter à aller plus loin car déjà, plus loin,il nous précède. Mais, tout est clair dans notre monde…pour la première fois de ma vie, je peux voir, je peux sentir, … Tout est déjà là, rien à conquérir. juste accepter et s’abandonner. Tout est clair dans mon coeur…

 

Oh My Love (Oh Mon Amour) – John Lennon

Oh my love for the first time in my life
My eyes are wide open
Oh my lover for the first time in my life
My eyes can see

Oh mon amour pour la première fois de ma vie
Mes yeux sont grands ouverts
Oh mon amour pour la première fois de ma vie
Mes yeux peuvent voir

I see the wind, oh I see the trees
Everything is clear in my heart
I see the clouds, oh I see the sky
Everything is clear in our world

Je vois le vent, oh je vois les arbres
Tout est clair dans mon coeur
Je vois les nuages, oh je vois le ciel
Tout est clair dans notre monde

Oh my love for the first time in my life
My mind is wide open
Oh my lover for the first time in my life
My mind can feel

Oh mon amour pour la première fois de ma vie
Mes yeux sont grands ouverts
Oh mon amour pour la première fois de ma vie
Mon esprit peut ressentir

I feel the sorrow, oh I feel the dreams
Everything is clear in my heart
I feel life, oh I feel love
Everything is clear in our world

Je ressens le chagrin, oh je ressens les rêves
Tout est clair dans mon coeur
Je ressens la vie, oh je ressens l’amour
Tout est clair dans notre monde

 








Trois fois rien à faire pour transposer cette belle chanson en un chant d’amour mystique… Il suffit de se laisser aller à être cette rose, peu de chose, mais destinée à s’épanouir au soleil, à offrir ses couleurs, puis s’effacer pour entrer dans l’éternité… “Pourtant j’étais belle, Oui, j’étais la plus belle Des fleurs de ton jardin…”

Mon amie la rose

On est bien peu de chose
Et mon amie la rose
Me l’a dit ce matin

A l’aurore je suis née
Baptisée de rosée
Je me suis épanouie
Heureuse et amoureuse
Aux rayons du soleil
Me suis fermée la nuit
Me suis réveillée vieille

Pourtant j’étais très belle
Oui, j’étais la plus belle
Des fleurs de ton jardin

On est bien peu de chose
Et mon amie la rose
Me l’a dit ce matin

Vois le dieu qui m’a faite
Me fait courber la tête
Et je sens que je tombe
Et je sens que je tombe
Mon cœur est presque nu
J’ai le pied dans la tombe
Déjà je ne suis plus

Tu m’admirais hier
Et je serai poussière
Pour toujours demain

On est bien peu de chose
Et mon amie la rose
Est morte ce matin
La lune cette nuit
A veillé mon amie
Moi en rêve j’ai vu
Eblouissante et nue
Son âme qui dansait
Bien au-delà des nues
Et qui me souriait

Crois celui qui peut croire
Moi, j’ai besoin d’espoir
Sinon je ne suis rien

Ou bien si peu de chose
C’est mon amie la rose
Qui l’a dit hier matin

 

Paroles/Musique : Cecile Caulier / Jacques Lacome

 

Photo : Carlos Blank photographié par Pedro Lollet pour Summer Diary Project, Caracas – Venezuela