Les hauts, les bas,
regarde-les d’un même oeil !
Ne regarde pas le visible,
regarde l’invisible !
Il n’ y a pas d’aile,
il y a le signe d’un envol,
il n’ y a pas de chanteur,
il y a la trace d’un chant.

Sohrab Sepehri, Pârâh,
in : L’Orient du chagrin,
traduit du persan par Jalal Alaviniar,
Lettres persanes, 2009.

 

Photo : Jon Kortajarena

Chris Garneau - La plus belle

“Ce soir, je serai la plus belle,
pour aller danser…”

Ca commence doucement.
Je connais cette chanson.
Ca fait bizarre.

Cette voix d’homme qui chante ces paroles:
“ce soir, je serai la plus belle”…
Non, ça ne se fait pas,
c’est choquant !

Quelque chose en moi se révolte.
Non, ça ne se fait pas !

Et pourtant, il y a quelque chose dans cette voix,
quelque chose de touchant.

Alors, je ferme les yeux.
Et j’écoute.
” Ce soir, serai la plus be-el-el-el-le…”
Je me laisse emporter
par cette voix si profonde,
et je me souviens.

Je l’ai chantée, fredonnée,
cette chanson.
Elle voulait dire quelque chose
pour moi.
Alors,
aujourd’hui encore…


La plus belle pour aller danser par Chris Garneau.

 

Je me souviens
mes murmures d’amour
vers toi mon Seigneur,
que mon âme a rêvé être la plus belle
pour aller danser
avec toi mon Seigneur,
mon Roi,
mon Prince,
mon Amour.

Tu peux me donner le souffle
qui manque à ma vie
dans un premier cri de bonheur.

Ce soir, je serai la plus tendre
quand tu me diras – diras ! _
tous les mots que je veux entendre
murmurer par toi, par Toi !

J’écoute et j’entends mon bien-aimé qui m’appelle.

“Le voici, il vient !
Sautant par dessus les montagnes,
bondissant par dessus les collines,
mon bien-aimé est comme une gazelle
ou le petit d’ne biche.
Le voici, il s’arrête derrière le mur,
et il regarde par la fenêtre,
il m’épie par le treillis.
Mon bien-aimé chante et me dit :

Debout, toi ma compagne,
ma belle, viens-t-en
car l’hiver est passé...”

(Ct, 2, 8-10)

Oh oui ce soir, je veux être la plus belle,
pour aller danser.
Tu viens me chercher, n’est-ce pas,
mon bonheur, ma vie,
mon roi ?

Je sais
que ce sont des amours éternelles,
il faut que je sois la plus belle,
la plus belle pour aller danser…

Puis-je oser ?

Oh si tu veux ce soir cueillir
le printemps de mes jours
et l’amour en mon coeur…

Zabulon

Why

 

 

“Why?” by Enigma

 

“Why?” by Enigma

I was childish and unfair
J’étais un enfant et injuste
To you, my only friend
Envers toi, mon seul ami
I regret, but now it’s too late
Je regrette, mais maintenant il est trop tard

I can’t show you any more
Je ne peux plus te montrer
The things I’ve learned from you
Les choses que j’ai apprises de toi
‘Cause life just took you away
Parce que la vie vient de te faire partir

I’m asking, “Why?”
Je demande “Pourquoi?”
I’m asking, “Why?”
Je demande “Pourquoi?”
Nobody gives an answer
Personne ne me répond.
I’m just asking, “Why?”
Je demande juste  “Pourquoi?”

But someday we’ll meet again
Mais un jour nous nous reverrons
And I’ll ask you
Et je te demanderai
I’ll ask you, “Why?”
Je te demanderai « Pourquoi ? »
Why it has to be like this
Pourquoi ça doit être comme ça
I’ll ask you, “Why?”
Je te demanderai « Pourquoi ? »
Please give me an answer
S’il te plaît, donne-moi une réponse.

Many years and stupid fights
Tant d’années et de combats stupides
Till we accept to see
Avant d’accepter de voir
How it was and it’ll always be
Ce qui était et sera toujours
Why it has to be like this?
Pourquoi ça doit être comme ça ?

Why we don’t realize?

Pourquoi nous ne réalisons pas?
Why we’re too blind to see the one
Pourquoi sommes-nous  trop aveugles pour voir celui
Who’s always on our side?
Qui est toujours à notre côté ?

I’m asking, “Why?”
Je demande “Pourquoi?”
I’m asking, “Why?”
Je demande “Pourquoi?”
Nobody gives an answer
Personne ne me répond.
I’m just asking, “Why?”
Je demande juste  “Pourquoi?”

Just tell me why
Dis-moi juste pourquoi
Why it has to be like this
Pourquoi ça doit être ainsi
That the good one’s disappear?
Que les bonnes personnes disparaissent ?
I’m asking you, “Why?”

Je te demande : “Pourquoi ?”

I’m asking, “Why?”
Je demande “Pourquoi?”
I’m asking, “Why?”
Je demande “Pourquoi?”
Nobody gives an answer
Personne ne me répond.
I’m just asking, “Why?”
Je demande juste  “Pourquoi?”

I’m asking, “Why?”
I’m asking, “Why?”
I’m asking, “Why?”
I’m asking, “Why?”

Je demande “Pourquoi?”
Je demande “Pourquoi?”
Je demande “Pourquoi?”
Je demande “Pourquoi?”

 

La-muerte-y-el-Cristo

Le Christ de Médine, reposant dans les bras de la mort (source photo : ici)

– Pourquoi? –

e7b0f271871032cb15e5b19ca698172dMon cher petit,

Je voudrais te dire pourquoi mon plaisir a été si grand, hier, lorsque tu m’as joué cette sonate de Schubert.
Tu voulais à tout prix me la jouer, tu avais peur, tu m’avais mis la partition dans les mains, sans doute pour te faire plus petit, alors que tu es si grand.

Tu attendais « des conseils »

Mon Dieu. Tu as de ces mots.

D’abord, le travail avec toi est un luxe. J’ai l’impression de voir des chaussures de prix, comme je n’en aurai jamais (toi, si, sans doute) : en cuir très fin et très souple, qu’on ne doit pas sentir aux pieds tant elles sont légères. On a passé du cirage dessus : il n’y faut plus qu’un petit coup de chiffon, elles brillent.

Moi, je ne me préoccupe pas de la fabrication de la chaussure, ni de sa taille, ni même du cirage. Je viens avec mon petit chiffon, je frotte, et la voilà somptueuse.

Surtout (pardon, mais je ne trouve pas d’autre manière de le dire), j’ai cru entrer en toi. Comme par une porte.
Un jour, en écoutant jouer le vieux Cherkassky, j’ai cru qu’il était devenu transparent, qu’on lui voyait l’âme à travers le corps. J’avais été excessif, j’avais hâte de faire des expériences.

Ce que j’ai ressenti hier était absolument nouveau. Peut-être unique.

J’ai vu comment tu étais au plus profond de toi, et c’était d’une grande beauté.

Ta manière de jouer le mouvement lent te disait tout à fait : l’absence de complète méchanceté, de vice, de mensonge, de désespoir.

En revanche, une présence active, de la tendresse (trait dominant, 95% du mélange), de la mélancolie, quelque chose de triste et de déçu, qui se mêlait drôlement au goût de la gaîté, à laquelle tu t’accroches comme à une certitude, l’amour du bien, du poli technique ; de l’énoncé clair et pur des lignes, dans le finale, le mépris de la facilité et de la disparate, la délicatesse des sentiments, la droiture de la pensée, le contrôle des actes, la morale en action (et non en réaction).

J’ai lu en toi « comme en un livre ouvert ».
Tu étais dans ce que tu jouais. Que m’importait Schubert, alors ! Ou plutôt, sa sonate ! Tu te rappelles ce que disait Giacometti ? « Si ma maison brûle, entre le Velázquez et le chat, je n’hésite pas, je sauve le chat. »
J’ai compris hier ce qu’il disait ; et je m’émerveille de l’avoir compris. Tu rends meilleur celui qui sait t’écouter ; et je m’émerveille d’avoir su le faire si vite, de ce que tu aies su me l’apprendre.

Tu as reçu ce don rarissime, le même que celui dont Schubert avait hérité, et que je ne sais pas nommer. (Un jour, peut-être, j’en trouverai le nom, et ce sera, somme toute, une immense victoire que je remporterai sur ma faiblesse. Quand on ne sait pas nommer une chose, c’est qu’on ne l’a pas en soi.)

Porte-toi bien, ne grandis pas trop.

 

Jacques Drillon, in « Propos sur l’imparfait »

 

source : Loquito in anotherdaylight